Aimer les petits gars, féerie du monde adulte (Jean Simoneau)

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Aimer les petits gars, féerie du monde adulte est un texte de Jean Simoneau, paru en 1978 dans l’ouvrage collectif Sortir.

Texte intégral

Ce texte historique est protégé contre les modifications.






Aimer les petits gars,

féerie du monde adulte


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JEAN SIMONEAU


La morale et les lois ont été créées
pour aliéner les individus et leur faire accepter leur mort.



Eh oui, je suis bel et bien pédéraste. J’adore les petits gars entre 10 et 17 ans. Ce n’est pas que je sois au-dessus de la loi, mais j’ai décidé de l’outrepasser, ayant la ferme conviction qu’il est urgent que ce soit fait. Je ne veux pas brailler sur la répression. Je sais, comme tout le monde, que le premier FLQ[1] des années 1963 a été vendu parce que la police a donné le choix à un pédéraste d’infiltrer et de dénoncer ce qui s’y passait ou de faire un petit tour au pénitencier. Ma première fois en tôle : les libéraux voulaient me balayer de leur route. Ce fut à peu près pour les mêmes raisons la deuxième et ce sera probablement semblable la prochaine fois. Il est difficile de vivre pédéraste sans avoir un petit brin de paranoïa ; mais ce petit handicap vaut bien la peine d’être enduré pour la joie que cette forme de vie nous apporte.

Ma préférence pour les petits gars date d’à peu près l’âge de quatre ans. C’était à l’époque où, dans le foin, les plus vieux nous avaient fait découvrir que les jeunes filles ont des vagins et les petits gars de magnifiques petites graines, bien différentes selon les personnalités. Ce choix n’est certes pas dû à des raisonnements psychologiques bien importants. Je trouvais le trou féminin laid et j’étais plutôt de tempérament curieux quant à la « longueur » que chacun pouvait bien avoir, sans oublier la forme.

Ma période de latence dont parle M. Freud a été de très courte durée. Il y avait beaucoup trop de petits gars à l’école pour mettre fin à mes études expérimentales de l’anatomie. C’était particulièrement intéressant parce que toujours défendu. J’étais comme la plupart des jeunes, pas plus vicieux, mais sûrement plus intéressé. Le vice n’existait pas. L’impureté, je ne connaissais pas cela. Ce fut d’ailleurs tout un drame quand j’en ai découvert l’existence.

Les belles petites fesses rondes, les petites queues, ce n’est pas d’hier que ça m’intéresse. Mais, l’amour, la passion, je n’ai connu ça qu’à partir de 16 ans. Ma première flamme a été un petit Français de huit ou neuf ans. J’ai commencé avec lui à apprendre ce que veut dire fascination. Ce n’était pas ce qu’il avait entre les deux jambes, je n’ai jamais pu y toucher vraiment. J’ai pu tout au plus, quelques années plus tard, constater qu’il avait de vraies belles fesses. Il ne faut pas se faire d’illusions, je n’encule jamais un petit, j’ai peur de lui faire mal. Mais, de belles formes, je sais reconnaître cela. Si je trouve un petit gars plus beau que presque tout ce qui peut exister, c’est aussi à cause des lignes, des rondeurs des fesses. Ce petit me fascinait surtout à cause de sa voix, à cause de ses regards, de ses attentions. Si vous l’aviez entendu rire quand je le portais sur mes épaules, vous auriez risqué de vouloir, vous aussi, un jour, être pédéraste.

Notre amour, puisque ça dépassait nettement le copinage, était en toute forme harmonieux avec la nature, aussi pur que l’air de la campagne et aussi exigeant que la survie. Fallait souvent se voir en cachette, ses parents n’étant pas très religieux. Fallait marcher trois milles avant de se rencontrer. C’était déjà l’extase de voir un petit corps dans toute sa splendeur courir au-devant de moi pour se jeter dans mes bras. « Embarque-moi sur tes épaules. » Il te disait ça avec un tel son que jamais les symphonies de n’importe quel classique ne pourront l’égaler.

Patrice, c’était une flamme dans tous les sens du mot. Moi, l’enfant modèle, j’étais devenu le petit révolté : j’insultais mon grand-père pour défendre mon droit d’aimer. À cette époque, je n’aurais jamais appelé cela de l’amour. J’avais bien trop peur d’être un fifi… c’était de la passion. Cette flamme existe toujours en moi quand je rencontre un petit gars qui me plaît. C’est comme si je redevenais moi aussi un enfant. Je me sens en communication d’âme à âme. Tout est langage avec un enfant. Les yeux, la façon dont il s’adresse à toi, la chaleur de la voix, la rigueur de l’étreinte, la confiance, l’espièglerie.

C’est ce qui rend la pédérastie difficile à décrire. Comment pouvoir expliquer le changement dans l’étincelle du regard lors d’une descente en traîneau, à des adultes surtout ?

Patrice, c’était la France dans une chanson, sa façon de dire mon nom. C’était la grange de son père qu’il fallait nettoyer. Le petit ruisseau près de la grande route. La perdrix mourante sous la neige. La boxe à l’école ainsi que la lutte pour se faire respecter. Les filles qui me traitaient de tapette, jalouses que je m’occupe plus d’un petit gars que d’elles. Patrice, c’était la désobéissance à mon ardeur d’être un saint. La pointe d’épingle de mon premier doute quant à l’honnêteté de Dieu. Ce fut quelques années de ma jeunesse et la première fois de ma vie où j’ai senti le besoin de vivre toujours de la présence de sa fraîcheur. Patrice rayon de soleil.

S’il avait fallu que les parents de l’un ou de l’autre apprennent l’ardeur que je mettais à mettre la main dans ses poches et à essayer enfin de savoir ce qui se trouvait là, Patrice aurait subi les foudres de l’enfer. Heureusement, ça se passait entre nous. Pour lui, ça n’avait pas d’importance. Je me demande s’il se souvient seulement de ces tendances. Je n’avais pas mis les mains dans son pantalon ou dans ses poches qu’il fallait courir ailleurs et ça court très mal la main dans la poche de l’autre. Nostalgie ! la neige, les bonshommes, le vent. Les mains gelées. Ces belles petites mains si difficiles à réchauffer quand elles rougissaient.

Eh oui, c’est presque platonique. D’ailleurs, avec les petits gars, c’est toujours presque platonique. La pédérastie, c’est probablement un point de rencontre de deux énergies qui filent dans le vide. La lumière jaillit dans des braises et allume un tronc d’arbre qui devient automatiquement l’arche de Noé. Il pleut partout des chocs électriques, sauf dans ce courant électromagnétique qui vient de créer deux êtres. Les neurones font la fête. Ça danse en saperlipopette là-dedans. C’est la guignolée. Des masques de clowns qui se succèdent au rythme des euphories.

Malheureusement, ces tranchées entre les obus de la vie quotidienne sont rares et disparaissent vite comme elles sont venues. Les saints martyrs canadiens vous parleraient bien de la kékette du petit Jésus entrevue dans les flammes, alors que les petits Indiens dansaient nus devant eux. De l’extase. Pas moi. Parfois, c’est une fête que tout le monde essaie de tuer dans l’œuf parce qu’on est jaloux que seulement ceux à qui la chose est défendue puissent trouver autant de joie de vivre.

Ça me rappelle. J’ai été encore une fois électrisé par un visage, nourri par la nature.

J’étais retourné à mon ancien métier, le journalisme, dans une ville de la Côte Nord. C’était un enterrement de première classe ; si loin et si peu rémunéré : $200 par semaine. L’espoir de reprendre la plume et surtout la curiosité de mettre fin à une expérience commencée avec la mort de mon père m’incitèrent à accepter.

Autant la ville me demeure hostile comme paysage, autant le fleuve m’éblouit.

J’avais presque le mal du pays quand un petit gars d’une douzaine d’années, installé sur le quai d’un bateau, attira mon attention. J’ai commencé par lui demander de poser sur ce quai, puis nous avons pris différentes photographies à terre. Peu de temps après, nous étions plus loin sur la plage. Il accepta de poser cette fois sans chemise, faisant semblant de créer un château de sable. La tentation était trop forte, la mer voltait mes sensations. À l’affût de tous les gestes de ce petit corps, j’admirais la perfection d’une telle création. C’est sans grand espoir que je lui ai demandé s’il acceptait de venir continuer de poser pour moi sur un immense rocher qui faisait pourtant à peine surface. Nous nous y sommes rendus, en pleine mer finalement, après avoir laissé nos bas et nos chaussures près d’une roche sur la plage. Nous avions à peine de l’eau aux genoux. Sur ce rocher, le petit accepta de poser en costume de bain. Je profitais des moments où il fallait changer de pose pour le caresser. Il était de plus en plus beau. De plus en plus sensuel. J’étais entièrement à son écoute. Les jeunes sont parfois fragiles et pour ne pas les blesser il faut savoir discerner tous les sentiments exprimés. C’était un moule, un modèle parfait. Je sentais ses chairs s’enflammer quand je lui passais les doigts sur les cuisses ou sur les jambes. C’est après d’infinies précautions que j’ai commencé à le tourner en le tirant après avoir mis ma main là où je n’aurais jamais cru pouvoir la rendre. Quelle concentration pour saisir toutes les formes à travers ce maillot. Puis, fallait partir, j’avais épuisé toutes les ressources de mon imagination et dépassé ce que j’espérais tirer de cette rencontre. Le petit me regarda et m’interrogea, découragé : « Je dois me rhabiller maintenant, complètement ? » Je n’étais pas certain de ce qu’il voulait dire, mais je crus le deviner à la façon dont il me regardait. Après réflexion, je lui avouai que oui, à moins… qu’il n’accepte, « mais tu ne voudras jamais te laisser photographier en faisant semblant de pisser ». Il était nu. Une photo. Une petite période de suçage, une photo, des caresses. Au premier cliché j’étais tellement excité, je tremblais comme une feuille. Il était exquis. Non circoncis. Une petite graine de trois-quatre pouces, avec un de ces ventres… fallait voir le paysage à travers ces cuisses : le golfe, le quai, la plage, le canot qui passe, les mouettes, la senteur marine. Quand nous sommes revenus, le temps s’était tellement figé dans nos têtes que nous avions oublié la marée montante. Nous en avions à l’enfourchure et nos bottes flottaient à trois pieds du sable. C’est ce que j’appelle le paradis terrestre.

Malheureusement, nos relations en sont restées là. Il m’a quitté gai comme un oiseau qui vient de retrouver son nid. Il m’agitait la main comme, le matin, il avait lancé sa ligne. Le soleil rougissait le golfe. Je venais de réapprendre à vivre. Ces tableaux sont essentiels pour écrire. Essentiels pour être heureux.

Il faut avoir joué aux fesses une fois avec un petit gars pour comprendre combien est enchanteresse cette complicité ; combien c’est important pour lui. C’est comme lui révéler qu’il peut être beau, qu’il est beau, qu’il peut être aimé et que l’amour, ce n’est pas une définition livresque.

Puisque j’en ai plein la tête, je me contenterai d’une dernière anecdote, d’une expérience vécue dans une école en construction. Deux des animateurs, deux femmes, n’acceptaient pas ma pédérastie. Jalouses ? Peureuses ? Je m’en fous. Une fois, j’aidais un petit bonhomme à descendre du toit. Il me plaisait beaucoup. Aussi, en le descendant je prenais plaisir à mieux saisir les rondeurs. Une des animatrices m’a fait une scène parce que j’avais joui en le faisant. Ce devait être le genre de femme qui aime qu’on se masturbe avec une poignée de braquettes. Malheureusement, elles sont encore nombreuses à percevoir la pédérastie ainsi. Comme les bonhommes, eux, qui enseignent la vie à leur fils à coups de pied dans le cul, je t’assure que ce petit cul, ils le surprotègent quand ils apprennent que certains ont découvert que ça ne sert pas uniquement à recevoir des coups. Cette première confrontation passée, j’ai décidé d’en informer tout le monde. Comme ça, pas de problème à cause de moi. Un des jeunes assistait à la rencontre. Le lendemain, je travaillais à la construction. J’avais quelque peu fumé. Je me sentais comme un petit vieux qui, à force d’être névrosé, ne peut plus se servir adéquatement de ses membres. J’examinais les jeunes, me les figurant comme étant les thérapeutes. À ma grande surprise, mes quatre petits médecins paradaient complètement nus devant moi. Ils découvraient enfin un autre mode de communication. C’était de les voir essayer d’éblouir. C’est inimaginable jusqu’à quel point ils peuvent sentir tout ce que tu ressens. Ils ont repris une ou deux fois l’expérience. Inutile de dire que, quand j’ai été seul avec eux, dès le premier jeu, le plus friand et le plus curieux a trouvé moyen pour qu’il y ait séance de déshabillage. Manque de pot, il a été la première victime de son invention. Tout le monde y a passé. Même le plus vieux qui, disait-on, refuserait certainement de s’y prêter (si jamais, lui, il accepte, je croirai que ça peut fasciner les jeunes). Il avait les yeux plus grands que la tête. Un du groupe décida même de vérifier de la main. Soudain, une voiture arriva. Le chien criait. J’ai eu peur, la panique, je me suis rhabillé, ainsi que tous les autres. J’étais furieux d’avoir réagi ainsi, mais je ne peux pas encore avoir confiance dans les adultes… la prison, ça te rend un peu dingue, des fois. Quand même j’aurais dit toute la nuit ensuite qu’il n’y a rien là, les jeunes savaient qu’on avait dépassé les permissivités habituelles. Ils n’ont pas eu tort, j’ai été renvoyé du terrain. La liberté a la limite d’être hétérosexuelle, comme l’a toujours voulu la société. Sinon, préparez-vous au grand questionnaire : les enfants doivent se sentir écrasés, ils ont une haine naturelle des adultes ; les enfants doivent garder une certaine crainte de ces expériences, ça doit les dégoûter… et c’est pour cela qu’habituellement le petit gars viendra me voir beaucoup plus qu’une fois… mais j’oubliais ce n’est pas pour cela, c’est que j’adore les enfants, je leur témoigne cette volonté d’être un enfant comme eux avec de grands airs d’adulte… ce n’est pas pareil, les enfants n’ont pas besoin de paroles pour te dire : je t’aime. Et aucune prison ne peut t’empêcher de leur répondre : je vous adore.


J’ai ton corps qui se tend
tes vertèbres qui se gonflent
j’ai l’haleine d’un gamin
un oui-oui éternel
entre les dents et sous les doigts
j’ai un rien qui s’emballe
le cœur déchire, la tête explose
je sens que je serai libre avec toi
… bel enfant pâmé sous ma langue…



La sexualité, une affaire plus que politique !

Il est urgent d’abolir les lois sur l’attentat à la pudeur, la grossière indécence, le détournement de mineurs, l’incitation à la délinquance et de remplacer le tout par une loi portant sur « la contrainte ». La répression sexuelle est à la base des complexes d’infériorité et du fascisme (W. Reich, La psychologie de masse du fascisme), la racine de l’esclavage et de l’esprit réactionnaire. Elle est sciemment maintenue par la religion, la publicité et le système judiciaire pour entretenir cet état de haine de soi nécessaire à un asservissement psychologique permanent.

Il existe des rapports amoureux, voire sexuels, entre adulte-enfant qui sont strictement nécessaires au développement global de l’enfant. Pour ce, la Cour, les cliniques psychiatriques et toutes ces instances répressives ne devraient jamais avoir droit de regard sur la morale ; la sexualité de quiconque, à moins qu’il n’y ait contrainte physique ou psychologique, ne regarde que les personnes impliquées.

Un affrontement se prépare entre les gouvernements fédéral et provincial concernant la jeunesse : le premier se veut plus contraignant alors que le second veut déjudiciariser.

Le gouvernement fédéral avait l’intention de présenter une législation en vertu de laquelle tout récidiviste ayant des rapports sexuels avec des enfants se verrait coller deux ans « indéfinis », sentence que même les prisonniers les plus endurcis n’ont que très rarement. Cette sentence signifie que tu es totalement à la merci du système carcéral en ce qui regarde ta libération. On peut demeurer en prison à perpétuité, sans même avoir un droit de rappel. Le gouvernement fédéral veut aussi rendre criminels les actes des enfants reconnus comme tels. Pourtant, s’il donne le droit à la police de prendre les empreintes d’un enfant, de le photographier pour les archives comme un adulte, le gouvernement est moins prompt à lui donner les droits équivalents. Si un jeune peut être incarcéré en vertu d’un système judiciaire, il doit en même temps avoir le droit de diriger sa propre vie et même de voter. S’il est jugé apte à être adulte en termes criminels, il doit être aussi vieux dans tous les autres domaines.

Loin d’avancer, la cause des enfants régresse. Même dans la déjudiciarisation prônée par le provincial, le tribunal continue d’exister, on remplace les flics par des travailleurs sociaux puisqu’ainsi les aveux sont plus faciles à obtenir. Les enfants continuent d’être perçus comme des intrus dans un monde d’adultes. Des intrus fatigants et parfois même menaçants.

Je connais un petit gars qui ne veut pas aller à l’école : il sera placé dans une institution parce qu’il refuse de s’ennuyer dans le moule dans lequel on le force à vivre. J’en connais un autre qui a déjà goûté à sa première fin de semaine d’internement. Le cas était un peu plus compliqué, du fait qu’il prenait aussi de la drogue. Pourtant, entre une plainte contre le « pot » et l’interrogatoire du policier de la C.U.M., il y a tout un monde : près de chez lui réside un célibataire qui arrive d’une autre province, qui aime les enfants. Tout ce qui a surtout intéressé les enquêteurs, c’était de savoir si ce célibataire aime jouer avec les bijoux de famille du petit. Décevant, celui-ci ne lui a jamais poigné la graine. Je me demande comment un adulte réagirait si, de plein droit, n’importe quel imbécile en uniforme de flic ou de travailleur social avait le droit de l’interroger sur sa vie privée, ses rapports sexuels avec les gens. Le respect de la vie privée devrait être le droit le plus élémentaire… Quant à l’école, je ne comprends pas que la loi ne puisse pas être interprétée comme une incitation à respecter le droit de tous les enfants à bénéficier de l’éducation gratuite plutôt que comme obligation dont la sentence peut aller jusqu’à être placé en institution. Le problème, c’est que les adultes ont tendance à régler les conflits avec les petits par la répression : il faut sauvegarder la morale et l’ordre bourgeois qu’elle défend.

Évidemment, il faut protéger la jeunesse. C’est pourquoi la dernière trouvaille des flics-travailleurs sociaux-psychologues prétend qu’un enfant qui a des rapports sexuels avec un adulte ou un autre enfant plus vieux n’a pas de traumatisme. Ses problèmes commencent avec la police, s’amplifient avec la Cour, etc. C’est un pas, on commence à dire la vérité, mais les limites sont vite atteintes : que faut-il faire si l’on a connaissance de telles relations entre mon fils et un voisin ? — Appeler la police, voyons, pour le moment, il n’y a pas d’autres moyens… Le morceau est lâché. Qui protège-t-on ? Les lois ? la morale ? ou l’enfant ? Pour tenir de tels propos, il faut être inconscient ou sadique.

À mon avis l’intervention de ces pseudo-scientifiques découle de l’importance que joue la morale dans l’établissement de ses structures qui ont toujours pour effet de garder le plus possible le peuple réactionnaire, le plus fasciste possible : ça permet de poursuivre le moulage de travailleurs dociles, étant bien culpabilisés. Cette structure est tellement bien ancrée dans nos mœurs qu’on se révolte alors qu’il est question de libération.

On pourra toujours dire que MM. Reich et Neil étaient contre l’homosexualité, c’est un fait, mais avaient-ils le choix ? N’étaient-ils pas déjà pointés comme maniaques, débaucheurs d’enfants ? Comment auraient-ils pu poursuivre leurs expériences s’ils avaient eu le malheur d’aller plus loin ? Plus tard, des psychiatres donneront raison à ceux qui prétendent que l’homosexualité est loin d’être maladive : c’est un état de vie, comme dit M. Bory.

L’élargissement face à la conception de l’homosexualité ne peut pas encore atteindre les relations de l’adulte avec l’enfant, parce qu’encore aujourd’hui la répression homosexuelle est très forte, souvent très raffinée, et surtout elle est soutenue par la majorité et même par certains homosexuels honteux qui s’en prennent aux pédérastes pour cracher leur dépit. On ne fait que commencer à établir la nuance entre un pédéraste normal, c’est-à-dire un homme qui adore les petits gars (comment pourrait-il leur faire du mal ?) et un sadique qui, par frustration et impuissance, s’attaque à un enfant. Le pédéraste est peut-être plus dégoûté que la moyenne des autres gens par de tels attentats ; mais il cherchera à comprendre avant de se lancer dans des réflexions superficielles et stupides sur le taux de répression envisagé. Si un enfant n’est pas tué par un policier, il est quand même profondément traumatisé quand celui-ci met son nez dans sa vie sexuelle ; et pourtant ce policier n’est pas puni ; au contraire, il est grassement payé.

Le problème principal dans ce secteur, c’est une éducation pourrie face à la sexualité, une éducation castrante et anti-plaisir. Une éducation basée sur la peur qu’entretiennent les curés et les journaux à sensation. Ce n’est pas encore aux parents qu’on donne du Reich à lire pour leur faire comprendre : « à quoi servent les phobies de la répression sexuelle ? pourquoi les a-t-on moulés dans cette haine du corps ? et à combien de rackets et de sadisme la répression sexuelle a-t-elle donné naissance ? » On oublie de parler de l’époque où les parents perçaient le prépuce du jeune homme avant d’y introduire des fils afin de s’assurer qu’il n’ait pas d’érections ou le goût de se masturber. Était-ce parce que la nature était déformée qu’on devait agir aussi follement pour répondre aux ordres des curés, médecins, psychologues-pédagogues ? Qui sont les plus malades, ceux qui soignent en projetant leur frustration sexuelle sur les enfants — les enfants qui, étant trop jeunes pour comprendre les mécanismes de la nature, sont de simples victimes de la morale — ou ceux qui vivent en fonction de l’amour, que ce soit accepté ou non ?


La vie sexuelle des enfants

« L’idéologie collectiviste et la vie collective des adultes, jointes au maintien de la traditionnelle répression de la sexualité infantile, de l’hypocrisie sexuelle et de l’éducation familiale, conduisent nécessairement à la délinquance juvénile. »
W. Reich, La révolution sexuelle.


Il est strictement évident que la répression sexuelle dans la vie des enfants non seulement entraîne de profonds traumatismes chez celui-ci, mais participe également dans la dévaluation de l’environnement social, lequel avec toute son hypocrisie devient une source plus que féconde de frustrations.

Les lois actuelles concernant l’attentat à la pudeur, la grossière indécence et l’incitation à la délinquance devraient être abolies et remplacées par une loi sur la « contrainte », laquelle loi pourrait s’appliquer tout aussi bien pour les adultes. Il est évident qu’il faudrait bannir le terme « sexuel » dans la définition de la délinquance puisque, comme tentera de le démontrer ce texte, contrairement à ce que la loi prétend la liberté sexuelle est le moyen le plus efficace de combattre la délinquance.

Par exemple, W. Reich, dans La lutte sexuelle des jeunes, affirme : « La répression sexuelle est une préparation directe à la frustration, au travail aliéné et à la famille monogamique. Le plaisir sexuel est réprimé parce qu’il est incompatible dans sa forme authentique, non aliénée avec les fondements même de l’aliénation. Le plaisir n’admet pas en effet la limitation, le renoncement, qu’exige le principe de réalité ».

« L’adaptation de la famille à une société d’oppression et d’agressivité provoquera nécessairement des réactions agressives de défense, de conformisme, de peur, d’insécurité, etc. et fournira à l’enfant un modèle au premier développement pulsionnel : l’introjection et l’identification apposeront un cachet indélébile à la formation du Surmoi et à la répression des instincts, avant même d’entrer en contact avec la grande société, l’enfant succombera à la triade névrotique qu’est la grande société. Tel est le sens de ce que Freud appelait le destin familial ».


But

Selon Reich, ainsi que les membres des écoles d’antipsychiatrie, la terrible réalité capitaliste est la réalité de la frustration, de la négation du plaisir, de la suppression du plaisir. Une science-fiction intitulée 1984, de George Orwell, démontre très bien là où peut conduire une telle idéologie.

Reich poursuit : « Le but de la suppression de l’activité sexuelle est de produire un individu qui s’ajuste à l’ordre autoritaire et qui s’y soumettra en dépit de toutes les misères et de toutes les dégradations. D’abord, l’enfant doit s’adapter à la structure de cet État autoritaire en miniature, la famille, ce qui le rendra plus tard entièrement soumis au système autoritaire général. La suppression de l’activité sexuelle des enfants et des adolescents est le mécanisme de base qui produit les structures caractérielles adaptées à l’asservissement politique, idéologique, économique. En effet, la répression de la sexualité naturelle chez l’enfant, particulièrement de la génitalité, rend l’enfant appréhensif, timide, obéissant, craintif devant l’autorité, gentil, tranquille, elle paralyse ses tendances rebelles parce que la rébellion est associée à l’angoisse. Elle provoque en inhibant la curiosité sexuelle de l’enfant, un obscurcissement général de son sens critique et de ses facultés mentales. »

Par ailleurs, A. S. Neil, dans Libres enfants de Summerhill, voit même un lien entre les problèmes sexuels des adultes et la répression : « La névrose sérieuse de l’homme débute avec les premières prohibitions génitales : ne touche pas. L’impuissance et la frigidité, l’anxiété plus tard dans la vie, datent du temps des mains attachées et des mains retirées, généralement avec une tape. Un enfant qui peut toucher ses parties génitales a toutes les chances de grandir avec une attitude sincère et saine envers la sexualité. Les activités sexuelles entre petits enfants sont saines et naturelles. Les parents ne sont que des autruches qui se cachent la tête dans le sable s’ils ignorent que leurs enfants ont des activités sexuelles dans les coins retirés. Ces sortes de jeux clandestins et furtifs entretiennent une culpabilité qui se traduira par une désapprobation des activités sexuelles quand ces mêmes enfants seront devenus à leur tour parents. Permettre l’activité sexuelle ouvertement est la seule chose à faire. Il y aurait infiniment moins de crimes sexuels dans le monde si les activités sexuelles étaient acceptées comme un phénomène normal. Ce que les parents moraux ne peuvent pas ou n’osent pas comprendre, c’est que tout crime sexuel ou toute anomalie sexuelle ne sont que le résultat direct de la désapprobation de la sexualité dans la prime enfance. »

Comme on le constate, pour le bien des enfants et de la société, il est extrêmement urgent de réviser les positions face à la sexualité des enfants dans le code pénal, et les adultes et les enfants ne vivant pas dans un vase clos, il en va de même pour ce qui a trait à ses formes de relations aussi.


Si c’était comme hier

Les études démontrant que la répression sexuelle fait partie intégrante de la lutte des classes sont de plus en plus nombreuses. Une étude a particulièrement retenu mon attention et je la livre ici pour appuyer la thèse de Reich, selon laquelle la répression sexuelle sert à l’asservissement de la population par la bourgeoisie.

La thèse du Pr. Van Ussel, historien belge, est que le syndrome antisexuel qui caractérise nos sociétés judéo-chrétiennes n’est pas issu des dogmes religieux, mais plutôt de l’embourgeoi­sement de la société et des nouveaux rapports humains caractéristiques de la bourgeoisie ; que toute nouvelle forme d’expérience sexuelle, si elle se veut authentique, ne peut être réalisée que grâce à des changements socio-économiques comme ceux qui ont porté la bourgeoisie au pouvoir ; et qu’on ne pourra parler de liberté sexuelle tant qu’elle restera la prérogative d’une minorité privilégiée.


histoire de la répression sexuelle, Jos van Ussel, Éditions du Jour/Robert Laffont.


Le fond du problème

Derrière le problème sexuel se cache donc le vrai fond du problème : la lutte des classes, le respect de l’individu.

La répression sexuelle de l’enfant, au Québec, c’est surtout un héritage religieux. Comment pouvoir passer sous silence toutes les petites et grandes misères des gens pour écarteler un peu les murs de la prison morale ? Le masochisme a été érigé en système : il permet de mieux faire accepter toutes les injustices desquelles les francophones ont été victimes. Comme les enfants prient dans les écoles de l’Ontario pour conserver l’amour entre les différentes ethnies, la morale était au Québec le grand lavage du cerveau pour éliminer tout besoin de changement.

Au Québec, la peur de la sexualité (qui se rattache aussi à la peur de la mort) est ce que notre héritage nous a laissé de plus vil. Aujourd’hui, c’est pratiquement une hantise a-culturelle. Combien tournent les yeux vers les États-Unis où la ferveur a fait naître un nouveau charismatisme (avec l’aide de la CIA) ? La nostalgie de l’ancien temps !

Pour justifier la lutte sexuelle, la droite québécoise s’est pourfendue à nous faire croire comme les religieux que nous sommes des asexués. Surtout les enfants. Il faut faire l’amour pour avoir des enfants, non pour jouir.

Les journaux à sensation jouent un rôle extrêmement dangereux et nocif pour le Québec : ils entretiennent à leur manière les messages jadis lancés par les curés en illustrant chaque jour une montée de la délinquance ou du crime… Ce qui justifie une répression policière plus forte. Ils rendent les crimes toujours un petit peu plus crapuleux ce qui justifie pleinement la police d’avoir plus de moyens de répression. Pour bien aiguiser les sentiments, on exploite le sort des enfants. On omet de dire que ce sont des cas exceptionnels.

Le mauvais sort fait aux enfants à cause de la pauvreté n’est-il pas, lui, monnaie courante ? Le chômage institutionnalisé par Ottawa au Québec, n’est-il pas la cause principale de la montée de la criminalité au Québec plus que la sexualité ? C’est pourtant là que devrait se manifester le vrai sens de la protection de la jeunesse : pas en l’empêchant de connaître les joies de la masturbation mutuelle, les délices du 34 ½ (coït buccal à sens unique), etc. pour sauver une morale qui n’a conservé dans l’esprit de plusieurs que le sens d’une vaste fumisterie permettant à un groupe de parasites (juges, avocats) de maintenir le taux de criminalité à un degré rentable pour eux. Si la prison est la meilleure école du crime, certains juges sont des pédagogues hors pair.

L’Aide à la jeunesse devrait être un service qui garantisse qu’il n’y ait plus de jeunes qui crèvent de faim, qui se font battre chez eux, qui se font abuser en étant dans des maisons d’accueil alors qu’ils ont besoin d’affection, qu’ils aient droit à une vie privée (leur poste, leurs loisirs). Et, cette forme de justice ne regarde pas les policiers. Elle ne justifie plus les besoins des psychologues à entendre les histoires de fesses pour se défrustrer et jouer ensuite aux putains offensées. L’Aide à la jeunesse, c’est leur fournir tous les moyens pour assurer leur développement.

La répression des rapports pédérastes-enfants ne cessera qu’au moment où il sera entré dans nos mœurs que la façon de vivre notre sexualité est un droit fondamental. À ce moment, les policiers devront cesser de s’attaquer aux homosexuels ; des maisons de passe hétéros et homosexuelles seront légalisées, etc.

Il est évident qu’il faut des limites. Cette limite est le respect de l’autre. Quand il appartiendra à l’enfant de décider s’il aime ça ou pas, le taux d’attentats contre les enfants diminuera certainement. Il y une différence entre enculer un enfant et le déchiqueter et jouir avec lui de relations sexuelles comme cela arrive communément entre deux personnes qui s’aiment, deux êtres qui se découvrent.

Il faudra apprendre à respecter les autres. Fini la répression par la peur, les rires et les sobriquets. Si la propriété est une chose dont il faut faire tant état, celle de son corps est certes encore de plus grande importance.

Dans nos écoles, faudra adopter une attitude plus libre dans l’enseignement et même dans les rapports avec les jeunes. Il faudra se rappeler quand on fera face au phénomène de la pédérastie que celle-ci respecte probablement plus l’enfant que les rapports engendrés par les gens dits normaux. Cela est vrai surtout en ce qui touche les questions comme l’égalité. La pédérastie est un réservoir de tendresse et d’amour tel qu’il peut faire peur à ceux qui en ont perdu la jouissance.

Nous posons en principe que la relation pédagogique est essentiellement perverse, non parce qu’elle s’accompagnerait de rapports pédérastiques entre maîtres et élèves, mais précisément parce qu’elle les dénie et les exclut. Et ayant exclut la pédérastie, pour pouvoir se constituer comme telle sous la forme que nous lui connaissons aujourd’hui, la relation pédagogique ne saurait réintroduire la pédérastie cette fois que sous la forme qu’il est convenu d’appeler perversion. Perverse dans l’exclusion : l’intérêt porté à l’enfant sans qu’aucun désir l’accompagne est toujours suspect. Pourquoi s’être consacré à l’éducation de l’enfance ou, comme on dit, pourquoi « cette vocation » ? Derrière l’impassibilité du pédagogue point, soit l’équivoque d’une paternité substitutive — mais paternité se greffe encore, nous venons de le voir, sur l’homosexualité — soit une volonté de domination sur des êtres inférieurs et immatures — nous l’avons vu aussi : le coït anal symbolique de la domination. Mais l’homosexualité originaire ou coït anal symbolique ce n’est précisément pas désir, amour de l’enfant, pédérastie.


(Émile perverti, René Schérer, Robert Laffont, 1976).


Libération : révolution

La libération sexuelle, est à mon sens, un élément essentiel dans la libération du Québec. Non seulement parce que dans ma poésie, je représente le Québec par un petit gars, mais parce qu’il s’agit de construire un pays neuf, une nouvelle façon de vivre plus humaine, plus authentique.

Un tel changement est certainement difficile à admettre pour plusieurs. C’est choisir de cesser de vivre dans une société fermée, craintive, pour examiner la place que nous réserve notre nouvelle indépendance. La révolution économique et politique ne sert à rien si elle n’est pas suivie d’une révolution culturelle, révolution qui s’impose d’elle-même puisque les données de base de notre comportement social s’en trouveront toutes changées. Il me semble hypocrite de ne pas parler de cet aspect essentiel des transformations qu’est appelé à vivre le Québec dans un nouveau statut politique, où il sera maître de sa destinée.

Dans quel genre de société voulons-nous vivre ? Quel taux de tolérance, de respect d’autrui et de soi-même assumerons-nous ? Un Québécois homosexuel sera-t-il un Québécois minoritaire pour préserver une morale que l’histoire nous présente comme étant maladive ? Serais-je encore privé de travail parce que je suis pédéraste ? N’accepterons-nous, comme en France, que les « homos mandarins » parce qu’on a pas la décence de reconnaître à tous le même droit et souvent la même utilité sociale ?

Déjudiciariser la protection de la jeunesse, c’est aussi enlever les nouveaux flics psychologues, trouver des moyens efficaces d’aider les délinquants à vivre heureux, et parfois, les rapports sexuels sont la seule preuve que le jeune « flo » a besoin pour commencer à s’accepter. Aider la jeunesse, c’est lui redonner le droit de déterminer elle-même son bonheur, ses jouissances et ses intérêts.

Fonder une société sur le bonheur de tous ses membres m’apparaît plus important que de créer une nouvelle frontière pour des motifs économiques. S’il faut obtenir justice dans le domaine économique au Québec, il faut aussi se rappeler qu’avant de mourir étouffés nous devons reprendre confiance en nous. Nous avons toujours été infériorisés. Cette confiance ne peut pas exister tant que nous nous n’aurons pas acquis le pouvoir de nous diriger nous-mêmes sans avoir besoin d’une armée, de flics ou autres pour le faire. Cette intériorisation s’abreuvant surtout à la répression sexuelle chez les jeunes, il faut la soigner à la racine.

La question n’est pas de trouver de nouveaux moyens plus subtils de contrôler les gens, mais de découvrir, d’inventer de nouvelles normes de vie qui permettent davantage l’épanouissement individuel, et par conséquent, collectif.

La Charte des droits de la personne ne peut avoir de sens que dans le cadre d’un élargissement de la tolérance, d’une recherche véritable de la démocratie et dans la définition des droits au bonheur et à la liberté. La vraie révolution est de veiller à ce que ces mots ne soient pas lettre morte, que ces définitions ne soient pas que l’accentuation de trois siècles de folies qui nous ont conduits on sait où en 1939.

Il faut aussi que les homosexuels cessent de rougir de ce qu’ils sont, qu’ils aient le courage de sortir des ghettos où la police va même leur taper dessus maintenant. Il faut à la rigueur que les pédérastes fassent savoir (même si c’est plus difficile puisque c’est toujours illégal) que la virginité des enfants c’est de la bouillie pour les chats, le rêve des asexués. Les jeunes se sentent. Ils aiment vivre leur sexualité. Ils recherchent les occasions pour le faire. Pas plus bêtes que les autres, quand ils sont pris, ils mentent (s’ils ne répètent pas bêtement ce que les flics leur ont dit de dire) pour s’en sortir. Ce qu’on ne dit pas, c’est qu’habituellement un jeune qui a une expérience sexuelle est vite transformé : plus gai, plus sûr de lui. Pour avoir une expérience avec un adulte, il doit nécessairement avoir confiance dans cet adulte. Règle générale, une expérience amoureuse avec un petit gars, c’est une ré-expérience du jeu. C’est une re-découverte de l’admiration. C’est re-donner foi dans son corps et sa beauté. C’est partager des joies. C’est aimer… C’est réallumer la conscience d’être. C’est tuer la peur de l’adulte. C’est se donner espoir de pouvoir s’exprimer sans toujours être réprimandé. À ce titre, la pédérastie dans une société aussi répressive que la nôtre, c’est presque une vocation.


Conclusion :

Avec l’adoption de la loi 88 par le gouvernement du Québec, garantissant le droit à l’orientation sexuelle, les mouvements homosexuels devront viser les gouvernements municipaux et fédéral dans les luttes futures.

Le harcèlement de la police de Montréal relève du municipal ; les lois, touchant par exemple l’indécence, nous viennent d’Ottawa. Reste la loi de la protection de la jeunesse (son nom même indique son ton paternaliste) au provincial. L’avenir nous dira si les homosexuels seront solidaires avec les pédérastes. D’ailleurs, on ne devrait plus parler de pédérastes, mais d’amoureux.

Si le gouvernement provincial a été ouvert en ce qui a trait à l’orientation sexuelle, tout ce que l’on peut pour le moins espérer, c’est qu’il éliminera les possibilités de chantage et de fascisme que pourrait éventuellement créer l’obligation de dénonciation pour sévices : il y a une différence entre jouir et se faire casser un bras. Si la droite québécoise veut faire respecter les principes de Paul VI, qui n’agirait pas comme il parle, c’est son droit ; mais qu’elle le fasse sans contrainte légale. La liberté du choix de sa morale, c’est aussi un droit de la personne.



Texte publié avec l’aimable autorisation de l’auteur.

Source

  • « Aimer les petits gars, féerie du monde adulte » / Jean Simoneau ; in Sortir / Luc Benoit, Paul Chamberland, Georges Khal, Jean Basile, éd., p. 139-155. – Montréal : les Éd. de l’Aurore, 1978. – 304 p. : ill., couv. ill. en coul. ; 23 × 15 cm. – (Coll. Exploration ; Sciences humaines). – ISBN 0-88532-148-0

Voir aussi

Articles connexes

Notes et références

  1. Front de Libération du Québec.