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Poèmes pour Boris Kochno
 
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Il faut en outre garder à l’esprit que le français n’était pas la langue maternelle de Szymanowski.
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Les textes ci-dessous n’ont pas été corrigés – si ce n'est en ce qui concerne l’orthographe. En notes, on indique quelques corrections (ou variantes) qui ont été suggérées par des lecteurs plus exigeants.
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==Texte intégral==
==Texte intégral==

Version du 14 juillet 2010 à 17:22

Les poèmes pour Boris Kochno ont été écrits en français par le compositeur et pianiste polonais Karol Szymanowski, qui était tombé amoureux du jeune danseur, âgé de quinze ans, dès leur rencontre à Elisavetgrad (aujourd’hui Kirovohrad) en Ukraine.

Signification des poèmes

Les quatre poèmes Ganymède, Baedecker, N’importe et Vagabond ont été offerts par Karol Szymanowski à Boris Kochno lors de leur séjour à Paris, à partir d’octobre 1920. Cela ne signifie pas qu’ils aient été écrits à son sujet : l’atmosphère de vagabondage sexuel, voire de prostitution qu’ils évoquent correspond mal aux sentiments réels qui unissaient l’adolescent à son mentor.

État du texte

Tournures étranges, anomalies grammaticales, rythmes peu communs, rimes parfois défaillantes, émaillent ces poèmes de quelques imperfections dont on ne sait si elles étaient voulues ou non. Certaines sont en effet particulièrement expressives.

Il faut en outre garder à l’esprit que le français n’était pas la langue maternelle de Szymanowski.

Les textes ci-dessous n’ont pas été corrigés – si ce n’est en ce qui concerne l’orthographe. En notes, on indique quelques corrections (ou variantes) qui ont été suggérées par des lecteurs plus exigeants.

Texte intégral



Ganymède


Little boy – ton regard mystérieux et sauvage [1]
S’envole vers l’infini. – Petit ange
Dont les yeux sont les reflets de célestes images
Et les astres irisés trempés dans la fange.

Ton amour est payé de sous… et ton âme, [2]
Esclave radieuse dont j’ignore le prix,
Tandis que ton petit corps frêle se pâme –
Insouciante et chaste, sourit.

Vers quel Dieu inconnu s’envole ton sourire ?
Pour qui la flamme secrète de tes divines ardeurs ?
Les cieux sont muets et tristes à mourir…
Sous ma main je sens battre ton petit cœur !

Qu’attends-tu ? Le mystère de l’amour
T’est connu. Ton regard errant
S’attache froid sur mes yeux ; au petit jour [3]
Tu as lu leur mystère – le Néant !

Tu me quittes. Sur tes lèvres fleuries
S’évanouit l’ardeur de mes caresses.
Tu emportes ton mystère – et l’oubli,
Tu me laisses seul – en détresse. [4]



Baedecker


Tu vins vers moi, souriant et humide, [5]
Me disant des mots tendres dans une langue que j’ignore,
La langue de ton pays. Dans ton regard limpide
Je vis naître le reflet de lointains amours.

Dis-moi – le soleil éclatant de tes cieux –
Engendre-t-il dans le sens des inconnues ardeurs ? [6]
Brûlantes comme les flammes saintes devant l’autel
Dans les temples de l’amour où languissent les cœurs ?

Dis-moi – la Nuit tiède, perfide enchanteresse,
Dont le sien frémit de myriades d’étoiles, [7]
Enivre-t-elle ton âme pure d’incomparables caresses,
En garde-t-elle le secret troublant dans son voile ?

Tu me parles… Les mots, comme d’une fleur éclose,
De ta bouche s’envolent vers la lueur du jour.
J’ai compris ton langage – et dans tes lèvres roses
Je puise, enivré, le poison d’amour.



N’importe


Ne parle plus… Laisse chanter le silence,
          Ses stances et ses romances.
C’est le divin chanteur qui accompagne l’amour
          La nuit et le jour.

Qu’importe que nos corps sont égaux – [8]
          Vers l’infini rament
          Nos âmes
          Et se pâment
Dans un délire radieux
          De tendresses,
          De caresses…
          Bon Dieu !

Qu’importe qu’on va nous juger cupides ! [9]
          Stupides
Sont ceux qui traînent
          Les chaînes
          D’esclaves !

Épaves d’amour, mendiants d’ardeurs
          Qui meurent
          Inassouvis
Dans l’orgueil et le mépris !

N’importe ! Je t’aime, j’adore
          Ton souple corps,
          La caresse lente
De ta bouche frémissante,
          Le délire, l’ivresse,
          La divine tendresse,
          Le vertige, l’oubli,
          Le rêve, l’infini…



Vagabond


Je cherche l’amour partout – et sans trêve
Je parcours les lieux équivoques –
Sinistre vagabond – et mon rêve
Je le trouve en guenilles et en loques.

N’importe, mon âme hautaine y puise
Une ivresse intense et fière.
Ce qu’on aime, on le méprise.
O, je ne suis point austère !

Les plus beaux contes de l’Orient
On les a pour ces quelques piastres. [10]
Faut accepter en souriant [11]
Les Dons dont nous comblent les astres.

Mais le fantôme bleu de l’amour
Se baladant dans la banlieue [12]
Paraît moins beau le jour ! [13]
– Oui, mais la Nuit te change les yeux,

La Nuit c’est la grande magicienne –
Schéhérazade – enchanteresse –
La sorcellerie de son haleine
Va te combler de rares ivresses.

Ne crains point d’aborder
Ce Gigolo qui pue le vice –
La Nuit divine va le changer
En Ganymède ou en Dionys.

C’est un jeune Dieu qui dans tes bras
Va se pâmer dans le délire.
Cette volupté tu l’éprouveras –
Elle est bien rare, cela va sans dire.

Or, moi qui ne suis pas fier,
Je ne crains point la déception.
Le lendemain – un sourire amer –
C’est tout. O amour, triste vagabond.



Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Notes et références

  1. Variante : Bel enfant – ton regard mystérieux et sauvage
  2. Variante : Ton amour est payé quelques sous… Et ton âme,
  3. Variante : S’attarde froid sur mes yeux ; au petit jour
  4. Variante : Tu me laisses seul – dans la détresse.
  5. Variante : Tu vins vers moi, souriant et timide,
  6. Variante : Enflamme-t-il les sens d’inconnues ardeurs ?
  7. Variante : Dont le ciel frémit de myriades d’étoiles,
  8. Variante : Qu’importe que nos corps soient égaux –
  9. Variante : Qu’importe si l’on nous juge cupides !
  10. Variante : On les a pour quelques piastres.
  11. Variante : Il faut accepter en souriant
  12. Variante : Se balade dans la banlieue
  13. Variante : Et paraît moins beau le jour !