C’est vraiment mieux ! (Maurice Balland)
C’est vraiment mieux ! est une nouvelle pédérastique de Maurice Balland. Elle fait suite à la nouvelle précédente, L’apprenti, qui raconte l’initiation sexuelle de Félix par une femme adulte.
Félix est un garçon heureux. Il n’a pas seize ans, tout juste un peu plus de quinze et demi et, enfin ça y est ! avec une expérience comme un homme ![1] Il lui plairait de recommencer. Mais, voilà, il n’a pas espoir de revoir Eugénie. En effet, il travaille maintenant dans un chantier à l’autre bout de Paris. De plus, il habite loin de chez elle. Et puis, elle ne lui a pas proposé de revenir la voir. Il serait osé et certainement mal poli de sonner à sa porte.
Après tout. Elle lui a donné un bon conseil qu’il va suivre. C’est bien le bout du monde s’il n’arrive pas à conquérir une fille. Mais, si encore il trouvait une autre femme avenante où il travaille en ce moment ?… On ne sait jamais. Si ça arrive, c’est certain, il comprendra vite, avant même que son compagnon s’en aperçoive… Car, maintenant, il saura à quoi s’en tenir. Il n’y a pas de doute, c’est vraiment intéressant d’être apprenti. « Ah, si les gars qui sont encore obligés d’aller à l’école savaient ça ! pense-t-il. Bah ! Ils verront bien à leur tour. »
Pour l’instant, son chantier est dans un quartier huppé de la capitale. Des appartements… faut voir ça ! Grands, avec des tas de pièces, et de beaux meubles, et des tableaux… De vrais musées ! On doit faire très attention quand on touche le moindre objet, ou quand on déplace une simple chaise. Et des tapis ! Il faut marcher dessus sur la pointe des pieds, et faire attention de ne pas se prendre dedans au risque de tout flanquer par terre. Heureusement, Félix est attentif et soigneux dans son travail. On n’aura pas de reproche à lui faire.
Les gens sont moins simples que là où il était auparavant, et ne sont pas près de vous tutoyer. L’autre jour, il a fallu aller chez une dame d’un certain âge. Lorsqu’ils se sont présentés, son compagnon et lui, elle les a reçus un peu froidement et leur a fait de multiples recommandations, un peu comme à des domestiques, insistant auprès de l’ouvrier, et ajoutant en montrant l’apprenti :
— Monsieur, faites bien attention, et veillez à ce que ce jeune homme ne touche à rien. J’espère que vous ne resterez pas trop longtemps, j’ai autre chose à faire que de vous surveiller.
Elle fut satisfaite. En effet, le travail ne traîna pas et ils purent aller ailleurs. Il n’y avait rien à regretter, la femme n’avait pas, loin de là, le charme d’Eugénie, ni ses yeux, ni sa poitrine. Il n’y avait pas davantage à espérer un goûter ni le moindre rafraîchissement. Est-ce que, aussi, elle eût pris un bain ? Ce n’était pas évident.
Ils allèrent ensuite dans un vaste appartement chez des gens d’une certaine classe, de la haute société peut-être. En tout cas, il y avait une cuisinière, sorte de femme de chambre ou de bonne à tout faire. Là, ce fut un peu mieux. Si les « patrons » étaient assez distants, la « bonne » par contre se montrait avenante et aimait la plaisanterie. Le compagnon de Félix et elle parurent s’entendre. Le garçon pensa : « Il se pourrait bien qu’il fasse avec elle comme avec Eugénie, ce sera du tout cuit pour moi. »
C’eut l’air de prendre tournure en ce sens. La jeune femme de service l’attira parfois à la cuisine pour qu’il puisse goûter :
— Tu es un gentil garçon, bien jeune pour travailler. J’ai pensé que ça te ferait du bien de prendre quelque chose et de te reposer un peu. Ton chef m’a permis de le faire. Les patrons n’y verront pas d’inconvénient.
Accorte, cette femme de service avait tout pour attirer. Ses cheveux châtain clair lui encadraient harmonieusement le visage. Sa poitrine avenante intéressa le garçon. « Ah, si je pouvais y mettre la main ! » pensa-t-il. Elle portait une jupe très courte, serrée, lui moulant les fesses. Un jour qu’elle était occupée en lui tournant le dos, elle se courba en deux, si bien que Félix aperçut le haut de ses cuisses. Ce qui le rendit désireux de voir plus en avant. Il se pencha pour regarder en dessous et eut l’impression qu’elle n’avait pas de slip, ou alors en avait un si petit qu’il ne cachait presque rien… Fortement mis en émoi, il dut porter la main à son sexe qui se coinçait dans son pantalon. À ce moment, la bonne se retourna. Il ne put cacher son intention. Elle rit :
— Tu es bien trop jeune, c’est pas pour toi. J’ai mon fiancé !
Félix rougit et pensa : « C’est raté », puis répliqua comme pour la braver et cacher son dépit :
— Oh ! Ça ne fait rien, j’ai ma copine !
De copine ! point. Il se désespère. Vraiment il n’attire pas les filles. Il se sent mieux en accord avec des copains et, à l’occasion, soit avec des gars au lycée, ou bien le dimanche avec un autre de son immeuble, ils s’isolent et, ensemble, ils se satisfont, n’ayant pas d’autre moyen pour calmer leur trop plein de vitalité sexuelle.
— Demain, nous irons à l’appartement du dernier étage. C’est un atelier d’artiste. Il y aura pas mal à faire. Nous y serons longtemps. Il paraît que celui qui habite là n’est pas emmerdant. Ce sera pépère.
Après avoir ainsi averti, le compagnon donne les consignes pour le lendemain. Il indique toutes les fournitures qu’il faudra prévoir. Il aime bien son apprenti, c’est un garçon consciencieux sur lequel il peut compter. Il lui montre le plan de l’appartement, tout le travail qu’il y aura à faire. C’est que le locataire a des tas d’appareils électriques, une chaîne hi-fi, il y a des spots un peu partout, des ordinateurs, et puis quoi encore ? Des gadgets à la cuisine, un système de sécurité à modifier, presque à installer à neuf :
— Tu vois, on ne va pas s’ennuyer.
— Et il vit tout seul ?
Félix s’inquiète. S’il faut rester longtemps dans un appartement où il n’y a pas de femme, adieu ses espoirs !
— Il paraît qu’une femme vient chaque matin pour faire le ménage puis les courses et préparer les repas et s’en va ensuite. C’est tout ce que je peux te dire. Du moins, c’est ce que je sais de la concierge. On verra quand on y sera.
Le soir, Félix rumine ses déceptions. Le travail lui plaît, c’est sûr, c’est varié, et il fait des découvertes intéressantes. Après l’aventure avec Eugénie, dans sa naïveté il a cru que des occasions de ce genre surviendraient souvent. La perspective de travailler longtemps où il n’y a qu’un homme le déprime et il tarde à s’endormir. Sa nuit est remplie de rêves : des filles qu’il cherche à atteindre et qui chaque fois lui échappent ; des femmes qui parviennent à l’accrocher et qui aussitôt disparaissent. Puis, il se voit happé par un homme qui se colle à lui et le couvre presque entièrement de son sexe devenu gigantesque comme pour le protéger. Il se sent heureux d’être ainsi enveloppé d’une virilité qui le fascine autant qu’il désire en être de même formidablement pourvu. À son réveil, il ne sut s’il avait fait un rêve ou un cauchemar. À qui pourrait-il en parler pour le savoir ?
Le matin, comme prévu, il monte avec son compagnon en haut de l’immeuble et entre dans l’appartement-atelier. Le locataire enjoué les accueille à bras ouverts :
— Ah, tout de même, je me demandais si vous alliez enfin venir. C’est que j’attends avec impatience la modification de l’installation pour brancher mes nouveaux appareils et continuer à travailler.
L’ouvrier promet d’aller aussi vite que possible :
— Ne vous inquiétez pas, on sera à deux.
— Ah, oui ! et… avec le beau jeune homme que vous avez là ! C’est un apprenti ?
— Oui ! et il sait déjà bien travailler, n’ayez crainte, vous serez satisfait.
— Je l’espère bien, j’aime toujours être satisfait.
Félix sent de suite de la sympathie chez cet homme qui le trouve beau. Il n’est pas peu fier de son physique. « Mais pourquoi les filles ne me remarquent pas ? » s’interroge-t-il. « Après tout, si ce monsieur n’est pas désagréable, cela vaudra bien la peine de s’attarder dans son logement. » Le garçon se résigne ; il aura la patience d’attendre une occasion plus tard.
Sitôt les ouvriers entrés dans l’appartement, l’homme se présente :
— Ici, c’est un ancien atelier de peintre. Je m’y suis installé parce qu’il est commode pour mes travaux en musique de synthèse, j’ai de la place pour tous mes instruments. Je m’appelle Martial, là, c’est mon neveu Olivier.
De fait, occupé à un ordinateur, il y a un garçon qui les salue puis retourne à son appareil. Félix a remarqué qu’à l’écran il y a un jeu comme ceux que l’on voit dans les cafés. Il regarde et oublierait presque qu’il est venu pour travailler. Olivier lui passe la manette :
— Oh, ça t’intéresse, tu peux jouer un peu.
Le compagnon permet :
— Pas longtemps. Faut qu’on s’y mette, on n’a pas de temps à perdre !
Le soir, avant de s’endormir, Félix pense à la journée. Il lui a paru bizarre que Martial et Olivier se soient parfois embrassés comme des amoureux. Olivier est un garçon à peine plus âgé que lui-même, seize ans peut-être, son oncle paraît avoir la trentaine bien sonnée. L’homme fait très viril avec un corps bien découplé. Il doit être sportif. Le neveu semble assez délicat, il n’est qu’un adolescent bien sûr, mais on sent chez lui de la douceur et une sorte d’abandon quand son oncle lui caresse la nuque ou lui donne de douces tapes sur les fesses. En tout cas, ils paraissent bien s’entendre. Félix, et cela l’étonne, ressent quelque jalousie : il aimerait tant qu’on s’intéresse à lui ! Martial, artiste, fait de la musique et compose avec un synthétiseur. « Il a l’air bigrement dans le vent, il est chébran » pense Félix qui se surprend à éprouver beaucoup de sympathie pour lui. Un beau modèle de mâle comme il désire tellement être.
L’ordinateur l’attire. Malheureusement il ne faut pas perdre de temps. Olivier qui l’a invité à la cuisine pour prendre un rafraîchissement lui suggère de rester en fin d’après-midi après son travail pour jouer un peu avec lui :
— Ton patron n’aura rien à redire. Et puis, Martial n’y verra pas d’inconvénient, il aime bien les jeunes. Je te montrerai les autres jeux, il y en a beaucoup, ça te plaira.
C’est ainsi que Félix, malgré tout encore enfant, après sa journée s’attarda pour jouer, peu pressé de rentrer à la maison et oublieux des filles par trop inabordables. Même, après que le travail fut terminé dans l’appartement, comme il était encore dans le même immeuble, il continua d’aller en fin d’après-midi chez Martial pour taquiner l’ordinateur. Vraiment, il se sentait bien chez cet homme compréhensif ayant de surcroît l’air de bien aimer les jeunes.
Bien plus, lorsqu’il dut quitter le quartier, envoyé ailleurs pour son travail, il accepta d’emblée l’invitation de revenir pendant les week-ends. Un samedi, tandis qu’il jouait, Martial s’approcha par derrière et lui enserra les épaules de ses bras comme il faisait parfois pour Olivier. De sentir cette présence et une haleine masculine dans son cou éveilla un désir jusqu’alors inconnu, d’autant que l’homme s’étant fortement plaqué contre lui, il décela une pression au bas du dos faisant deviner une excitation analogue à celle qu’il éprouvait en son propre sexe. Il ne sut que penser, ni surtout que faire, Martial se bornant à l’encourager dans son jeu et à compter les scores avec lui. Le garçon songea : « Ah, si c’était une femme, je ne serais pas long à lui faire comprendre… Mais un homme ! Qu’est-ce qu’on pourrait bien faire ? Comme avec mes copains ? Je ne vois pas. Entre nous, ça se comprend, mais, avec un homme, est-ce que je pourrais faire pareil ? Il serait étonné si je lui demandais ça… » Il ne se passa rien qui pût par contre étonner l’adolescent, Martial était sans doute un homme sérieux !
Quand Félix revint le samedi suivant, Martial le reçut en robe de chambre d’étoffe légère et soyeuse. Le drapant et tombant sans être serré à la taille, le vêtement le faisait paraître plus grand. Le garçon fut subjugué. « Un vraiment bel homme » songea-t-il. De plus en plus attiré à le connaître intimement, il se prit à désirer le voir nu, d’autant qu’aux moindres mouvements les pans croisés de la robe s’écartaient quelque peu, laissant prévoir qu’un rien pourrait les faire s’entrouvrir largement.
— Il fait chaud, ne trouves-tu pas ? Mets-toi à l’aise comme moi.
Et Martial d’enlever sa robe pour ne rester qu’en slip, tout en faisant signe au garçon de ne pas hésiter à en faire autant. « Après tout, je ne risque rien » songe en totale confiance l’adolescent qui, sans réticence aucune, s’exécute et de même ne garde que son slip. Martial sert des jus de fruit et met le tourne-disque en route. L’ambiance créée enchante Félix quelque peu rendu fier de se voir ainsi comme à égalité avec un homme dont il admire la belle prestance et qu’il dévore des yeux. Il lui semble être l’objet d’une grande marque d’amitié le disposant à laisser Martial entreprendre ce qui lui plaira. Cet homme est distingué, cultivé, il va lui révéler des choses intéressantes. Son compagnon de travail lui a souvent dit qu’il fallait sauter sur les occasions, il y a toujours quelque chose à apprendre ! La conversation s’engage :
— Tu as une petite amie ?
— Non. Je n’arrive pas à intéresser les filles. Je ne sais pas pourquoi. Et pourtant, j’essaye !
— Oh, moi aussi, tu sais, je n’intéresse pas les femmes, mais je ne me suis pas inquiété pour ça, je vis très bien seul.
— Oui, bien sûr, mais ce ne doit pas être gai de ne pas avoir de femme.
— Tu crois ?
À mesure que la conversation se poursuit, Martial se fait plus pressant. Assis près de Félix sur le canapé, il s’est rapproché comme pour parler plus confidentiellement, puis, parvenu tout contre lui, il caresse ses épaules puis sa poitrine et progressivement glisse ses mains en descendant le long de son corps. Cela n’inquiète pas le garçon et semble même lui être particulièrement agréable surtout quand les mains parviennent à son sexe. Il n’éprouve aucune réticence et se sent même rassuré quand il remarque que Martial autant que lui-même éprouvent un désir équivalent et manifeste au travers du peu d’étoffe qui les couvre encore. Sans se concerter, se comprenant du regard, simultanément et prestement ils se libèrent du dernier obstacle et s’exposent dans leur nudité totale.
Ce soir-là, avant de s’endormir, Félix se revoit avec Martial. Subjugué par l’ampleur du sexe s’était offert à lui, en comparaison, il avait craint de décevoir l’adulte. Il fut pourtant complimenté, étant pourvu autant que l’avait supputé celui-ci qui sans plus attendre lui fit comprendre ce qu’il désirait. La demande parut insolite au garçon. Félix n’avait pas songé à cela, pourtant, il ne se fit pas prier et il pénétra Martial comme s’il était habitué à ce genre d’action. Il est vrai que c’était un peu comme avec Eugénie, pas du même côté sans doute, et à son étonnement, il jouit aussi intensément qu’avec la femme, et fut également rendu pantelant par la violence des spasmes ; de même il fut comblé à sentir contre son corps une autre chaleur signe d’un bonheur partagé. Il se promit de retourner chez Martial au prochain week-end. Une semaine à attendre !
Les jours lui parurent longs. Il fut quelque peu distrait au cours de son travail. « Qu’a-t-il donc, il doit avoir un béguin » pensa son compagnon. C’était bien autre chose ! Félix oublieux de son envie de fille et devenu épris d’amitié pour Martial était préoccupé de savoir comment pleinement le satisfaire. Il imaginait… Quoi ? Son peu d’expérience faisait tourner les idées dans sa tête. « Après tout, je verrai bien ! »
Le samedi suivant, brûlant d’envie pour l’expérience qu’il s’était décidé à connaître, sitôt entré chez Martial, hardiment il demanda en sa faveur ce que celui-ci avait éprouvé la fois précédente. Il dut prier un peu, l’adulte craignant de lui causer quelque douleur. À vrai dire, Martial le désirait autant que lui, préférant pour cela un adolescent à peine sorti de sa puberté, souple encore et disponible et non déjà sujet à la sclérose qui commence en tout être parvenu à l’état adulte. C’était pour lui en quelque sorte se conserver en état de jeunesse. Félix n’eut donc pas tellement à supplier pour enfin ressentir ce que l’homme avait éprouvé et ainsi s’équiparer à lui.
Rentré chez lui, il conservait en son fondement la sensation de la présence qu’il avait cherchée. Cela ne l’inquiéta pas. Prévenu par Martial, il savait que cela passerait et que cet inconvénient à l’avenir s’estomperait, laissant le plaisir entier. Malgré tout, il n’avait pas été déçu, et fut comblé même, ayant découvert comment ressentir au plus profond de son être, une volupté s’irradiant intensément dans toutes les parties de son corps. « Ah, c’est vraiment mieux comme ça » s’était-il écrié, « y a pas à dire ! C’est super ! »
De ce jour, Félix ne se préoccupa plus d’intéresser les filles. Il eut conscience que par elles il ne trouverait pas le bonheur et qu’une amitié virile comme celle de Martial saurait satisfaire les aspirations de son être. Sans doute allait-il s’engager sur des sentiers peu communément battus. « Mais, songea-t-il, il ne peut y avoir d’obstacle à l’amour ! »
Voir aussi
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Notes et références
- ↑ Voir la nouvelle précédente : L’apprenti.