Uraniens

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Les uraniens (Uranians en anglais) sont un groupe informel et plus ou moins clandestin d’écrivains britanniques d’inspiration pédérastique – ou plus rarement homosexuelle –, principalement actifs entre 1858 et 1930 à Londres et à Oxford.

Origine du terme Uranian

On pense généralement que l’anglais Uranian trouve son origine dans le terme Urning utilisé par le sexologue allemand Karl Heinrich Ulrichs vers 1860-1870, et qui aurait ensuite été traduit par John Addington Symonds et plusieurs autres.

Cette origine est pourtant contestée. Dans son ouvrage Secreted desires : the major Uranians : Hopkins, Pater and Wilde, Michael M. Kaylor estime au contraire que le terme anglais ne doit rien à celui créé par Ulrichs :

Given that the prominent Uranians were trained Classicists, I consider ludicrous the view, widely held, that ‘Uranian’ derives from the German apologias and legal appeals written by Karl-Heinrich Ulrichs in the 1860s, though his coinage Urning — employed to denote ‘a female psyche in a male body’ — does indeed derive from the same Classical sources, particularly the Symposium. Further, the Uranians did not consider themselves the possessors of a ‘female psyche’; the Uranians are not known, as a group, to have read works such as Forschungen über das Räthsel der mannmännlichen Liebe (Research on the Riddle of Male-Male Love); the Uranians were opposed to Ulrichs’s claims for androphilic, homoerotic liberation at the expense of the paederastic; and, even when a connection was drawn to such Germanic ideas and terminology, it appeared long after the term ‘Uranian’ had become commonplace within Uranian circles, hence was not a ‘borrowing from’ but a ‘bridge to’ the like-minded across the Channel by apologists such as Symonds. (p. xiii, footnote) Étant donné que les principaux uraniens étaient rompus aux études classiques, je trouve ridicule l’idée, souvent avancée, que le mot “uranien” viendrait des justifications et des revendications législatives rédigées en Allemagne par Karl-Heinrich Ulrichs dans les années 1860 – même si sa création Urning, employée pour désigner « une âme féminine dans un corps masculin », dérive en effet des mêmes sources classiques, en particulier Le banquet. De plus, les uraniens ne se considéraient pas comme ayant une « âme féminine » ; on n’a pas connaissance que les uraniens, en tant que groupe, aient lu des ouvrages tels que Forschungen über das Räthsel der mannmännlichen Liebe (Recherche sur l’énigme de l’amour entre mâles) ; les uraniens étaient à l’opposé des revendications d’Ulrichs en faveur d’une libération androphile et homoérotique au dépens de la pédérastique ; et même lorsque une relation a été faite avec ces idées et avec cette terminologie germaniques, elle est apparue longtemps après que le terme “uranien” soit devenu courant dans les milieux uraniens, et elle n’était donc pas un “emprunt de”, mais, pour des apologistes comme Symonds, une “passerelle vers” les semblables d’outre-Manche. (p. xiii, note)


Une sensibilité commune

L’uranianisme (uranianism) se caractérise essentiellement par des sentiments amoureux orientés vers de jeunes adolescents et par des références à une Grèce antique idéalisée, ainsi que par l’utilisation de formes poétiques conventionnelles.

Les poètes principaux de ce cercle furent William Johnson Cory, Lord Alfred Douglas, John Francis Bloxam, Charles Kains Jackson, John Gambril Nicholson, le révérend E. E. Bradford, John Addington Symonds, Edmund John, John Moray Stuart-Young, Charles Edward Sayle, Fabian S. Woodley, et plusieurs autres auteurs publiant sous des pseudonymes tels que “Philebus” et “A. Newman” (voir ci-dessous une liste plus complète). Le romancier excentrique Frederick Rolfe (alias “Baron Corvo”) avait un rôle unificateur au sein de ce réseau, que ce soit à Venise ou en Grande-Bretagne.

À la fin du règne de Victoria et pendant celui d’Edward II, les tabous sexuels étaient encore trop forts pour que le groupe des uraniens puisse gagner une audience importante. En outre, la plupart de leurs œuvres ne furent publiées qu’à un très petit nombre d’exemplaires (le plus souvent à compte d’auteur). Enfin, le caractère généralement sirupeux et parfois misogyne de ces poèmes ne pouvait guère leur faire atteindre la renommée.

Cependant, l’historien des mœurs Neil McKenna est d’avis que la poésie uranienne a joué un rôle central dans la culture homosexuelle des classes supérieures britanniques au cours de la période victorienne. Il met en valeur, en particulier, le fait que la poésie fut le moyen principal par lequel des écrivains tels qu’Oscar Wilde, George Ives et Rennell Rodd Rennell ont tenté de combattre les préjugés de leur époque.

Certains écrivains plus connus furent en contact avec les uraniens, tels Edward Carpenter ou le poète-imprimeur Ralph Nicholas Chubb, à l’art obscur mais prophétique, avec ses majestueux volumes lithographiés célébrant le Garçon en tant qu’idéal.

Liste des poètes uraniens

Pour permettre de suivre approximativement l’évolution du groupe uranien, les auteurs sont classés ci-dessous par ordre chronologique de naissance :

Année de naissance inconnue :

Voir aussi

Bibliographie

  • Kaylor, Michael Matthew. 'Lad's Love: An Anthology of Uranian Poetry and Prose, Vol. I'. – Kansas City, Missouri, USA : Valancourt Books, 2010. 631 s. Neuveden. ISBN 978-1-934555-95-8. Valancourt Books website info
  • Kaylor, Michael Matthew. 'Lad's Love: An Anthology of Uranian Poetry and Prose, Vol. II'. – Kansas City, Missouri, USA : Valancourt Books, 2010. 639 s. Neuveden. ISBN 978-1-934555-96-5. Valancourt Books website info
  • Mader, Donald H. « The Greek mirror : the Uranians and their use of Greece », in Journal of Homosexuality, 49.3-4, p. 377-420. – 2005.
  • McKenna, Neil. The secret life of Oscar Wilde : an intimate biography. – London : Century, 2003.
  • Reade, Brian (ed.). Sexual heretics : male homosexuality in English literature from 1850 to 1900 : an anthology. – London : Routledge & Kegan Paul, 1970. – XII-460 p. : 8 pl., jaquette ill. ISBN 0-7100-6797-6
  • Taylor, Brian. « Motives for guilt-free pederasty : some literary considerations », in Sociological Review, Vol. 24, No. I, p. 97-114. – 1976.

Articles connexes

Auteurs (par ordre alphabétique)

Divers

Liens externes

  • (en) La première version de cet article est partiellement ou en totalité issue d’une traduction de l’article de Wikipedia en anglais « Uranian poetry ».

Notes et références

  1. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 248. – Wikipedia en anglais, Francis Edwin Murray.
  2. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 240. – Wikipedia en anglais, Edwin Emmanuel Bradford. – Rictor Norton, A history of homoerotica, Blessed are the Puer in heart : E. E. Bradford. – Matt & Andrej Koymasky Home, Reverend Edwin Emmanuel Bradford.
  3. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 244. – Wikipedia en anglais, S. E. Cottam.
  4. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 51, 90.
  5. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 248. – Une liste des fils et filles du clergé anglican morts pendant la Grande Guerre (téléchargeable en PDF) indique que Walter Lock Mackie, membre de la Canadian Expeditionary Force, fils du Révérend Edmund St. Gascoigne Mackie, de Hordle (Hampshire), est tombé dans la bataille de la Somme le 2 octobre 1916.
  6. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 240. – Wikipedia en anglais, John Leslie Barford.
  7. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 141-142, 179, 192, 253.
  8. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 148, 240.
  9. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 93.
  10. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 248.
  11. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 249.
  12. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 250. – Sur la carrière d’Arnold W. Smith, voir A short history of Henry Thornton School.
  13. Timothy d’Arch Smith, Love in earnest, London, Routledge & Kegan Paul, 1970, p. 92-93, 172, 250.