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Dernière version du 12 mai 2019 à 22:23

On trouvera ci-dessous des articles publiés en 1908 dans Le Progrès du Finistère, Le Réveil du Finistère (devenu ensuite La Démocratie bretonne), Cherbourg-Éclair & Réveil Maritime, à propos de l’affaire de mœurs impliquant les abbés Alexandre Thomas et Joseph Bulot à Quimper.

Ces articles sont classés par ordre chronologique.

Le Réveil du Finistère (4 avril 1908)



À QUIMPER

Un Scandale Clérical
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Dans une chapelle. -- Scènes dégoûtantes.
En flagrant délit.
Arrestation de l’abbé Thomas, aumônier du Lycée
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Depuis longtemps, la police était avertie par la rumeur publique que des scènes d’une nature toute spéciale se déroulaient dans la chapelle du lycée, dont l’abbé Thomas était aumônier. Ces derniers temps, des accusations très précises furent lancées et M. le commissaire de police décida d’en avoir le cœur net.

La chapelle du lycée est complètement séparée de cet établissement, et est reliée directement à la voie publique par une porte spéciale. Il n’est donc pas besoin pour y entrer de passer par la conciergerie du lycée ; c’est ce qui explique comment des personnes étrangères pouvaient y pénétrer. L’abbé Thomas, qui avait été présenté à l’administration par le clergé pour remplir les fonctions d’aumônier, était en possession d’une clef de la porte donnant sur la rue et entrait par conséquent dans la chapelle à l’insu du personnel du lycée.

Mardi soir, M. Judic, commissaire de police plaça un agent en surveillance. Vers six heures et demie, l’abbé Thomas arriva par la porte donnant sur la rue et fut presque aussitôt rejoint par un garçon d’environ seize ans. La pudeur nous oblige à taire ce qui se passa alors.

Ses instincts de bête satisfaits, l’abbé tira de la monnaie de sa poche et la remit à la victime ; mais celle-ci, trouvant sans doute que ses services étaient trop peu payés, réclama davantage et finit par recevoir un peu plus.

Le délit était flagrant. L’agent sortit immédiatement de sa cachette et retint les acteurs de la scène jusqu’à l’arrivée de M. Judic, immédiatement prévenu. L’abbé fut conduit au commissariat de police et de là au Parquet.

Interrogé de suite, l’aumônier ne nia pas les faits qui lui étaient reprochés ; il raconta même avec force détails les pratiques auxquelles il s’adonnait, toujours dans la chapelle.

À la suite de cet interrogatoire, l’abbé Thomas fut écroué.

D’après la rumeur publique, cet abbé se livrait depuis plus de vingt ans à des actes de cette nature et ses victimes, fort nombreuses, étaient presque toutes des jeunes gens de la classe ouvrière. L’abbé, du reste, a formellement nié s’être livré à ses pratiques favorites sur les élèves du lycée ; et il est même certain qu’en cela il dit vrai.

L’abbé Thomas est un homme d’une soixantaine d’années ; il est chanoine honoraire de la cathédrale.

*
*    *

Voilà donc à quoi servent les aumôniers de Lycée ! Le gouvernement va-t-il enfin se décider à mettre à la porte de nos établissements d’enseignement ces gens qui n’y viennent que pour essayer de les salir ? L’affaire de Quimper sera une dure leçon ; pour qu’elle ne se renouvelle pas, il faut une mesure énergique, et achever de débarrasser définitivement le pays de ces gens qui prétendent aller chercher ailleurs qu’en France, les belles maximes qu’ils mettent trop souvent en pratique. Qu’on les expédie à Rome, et bon voyage.



Le Progrès du Finistère (4 avril 1908)



LA ROBE DU PRÊTRE
——————


Elle a paru sur les champs de bataille, debout dans le sifflement des balles. Ainsi la portait M. du Marc’hallac’h sur le champ de bataille de Champigny, tandis que les soldats couchés ripostaient au feu des Prussiens.

Elle a paru dans les taudis décimés par la peste et le choléra, avec le prêtre qui consolait les dernières heures des pestiférés, et ensevelissait les cadavres quand nul, de peur de la contagion, n’osait affronter cette redoutable besogne. Le geste de Mgr de Belzunce fut très beau, mais j’ai connu de modestes prêtres qui en sont morts. La robe de l’abbé Salaun, d’Audierne, que l’on vit flotter un jour au gré des vagues après l’affreuse période de choléra, était une robe de héros.

On l’a vue bravant la rage de l’Océan, défiant la mort hurlante, comme récemment à Molène avec l’abbé Pelleter, pour secourir une population menacée de mourir de faim.

Elle a paru devant les balles de nos soldats pour les empêcher d’atteindre des travailleurs égarés, d’autres Français, comme à Fourmies, ou comme sur les barricades de 1848 que Mgr Affre arrosait de son sang.

Elle a paru chez les corsaires d’Alger, dans les bagnes d’esclaves où, pour sauver un père de famille, Vincent de Paul se chargeait lui-même de ses chaînes.

Elle a paru, la robe du prêtre, dans la case du sauvage, avec le missionnaire qui, pour porter au loin le nom du Christ et celui de la France, allait au-devant de la flèche empoisonnée qui devait l’atteindre en plein cœur.

Sur tous les terrains où l’héroïsme a pu se déployer, la robe du prêtre a marqué sa place. De tout cela nos ennemis n’ont jamais fait honneur au clergé. Quand on a tenté d’arrêter leurs sarcasmes en leur jetant ces souvenirs, ils ont toujours répondu : « Ce sont des exceptions » ! Et ils avaient raison de ne pas juger tous les prêtres d’après ceux-là.

Car on a vu aussi parfois la robe du prêtre entre deux gendarmes sous le coup d’accusations infamantes. Alors cependant, et tout de suite, nos adversaires, Réveil en tête, ont solidarisé le clergé tout entier avec l’homme tombé. Ils se sont écriés : « Ils sont tous ainsi » ! et la robe souillée du prêtre coupable, ils en ont fait le manteau d’ignominie du corps tout entier.

Hélas ! oui, c’est là notre destinée. Tandis que nos bienfaits et notre héroïsme, lorsque même on daigne les reconnaître, ne sont attribués qu’à des individus, les fautes de quelques-uns sont immanquablement imputées à tous. Et chaque robe de prêtre devient une cible désignée à la boue qui ne devrait atteindre que quelques malheureux.

Les autres corps de citoyens n’ont point ce redoutable privilège.

On ne songe pas à vilipender l’armée parce que des Bazaine, des Dreyfus, des Esterhazy et des Ulmo s’y rencontrent.

Le corps des banquiers n’est pas atteint parce que des Rochette et des Eliez Evrard y spéculent sur la confiance du public.

Les instituteurs ont leurs Moreau et leurs Coat, et nul ne songe à les assimiler tous à ces malheureux.

À Cherbourg, récemment, au cours d’une manifestation socialiste, un prêtre fut insulté. Le citoyen Mars, secrétaire général du Syndicat des travailleurs de l’arsenal, en prit occasion pour faire entendre à ses amis ces courageuses paroles : « Il faudrait, camarades, que les ouvriers soient assez conscients pour comprendre que, lorsqu’un prêtre faillit à son devoir, non seulement il est injuste de rendre responsables ses confrères, mais qu’encore la faute de l’individu n’infirme en rien la doctrine. Aussi le scandale ne prouve-t-il rien contre la doctrine religieuse, pas plus que la trahison de Briand et Viviani ne peut servir à attaquer le parti socialiste. »

Rien de plus exact, mais il semble que cette distinction soit hors de la portée des intelligences vulgaires, et que tous les prêtres soient vraiment solidaires de la faute de l’un des leurs.

Eh bien, soit ! D’où cela vient-il ? De la rareté même de la chute. Car si elle avait été fréquente, il y avait longtemps que le mépris public aurait fait de nous des disparus.

Certes, des défaillances sont inévitables, le prêtre est homme. Mais que l’on cherche dans les statistiques du Ministère de la Justice. On y verra que sur 100.000 personnes d’une même profession ayant subi une condamnation, s’il se rencontre 3 prêtres, on trouve 6 professeurs laïques et l’on sait si pourtant on les protège, 10 médecins ou chirurgiens, 28 artistes et 48 avocats, notaires ou avoués.

Et ainsi, s’il y a dans le clergé des défaillances individuelles incontestables, l’on cherche en vain quelle catégorie d’hommes, spécialement parmi les journalistes genre Réveil, serait en droit d’impliquer dans ces chutes la presque unanimité innocente du corps entier.

Justice, certes, est due aux coupables, si véritablement les accusés le sont ; mais justice aussi est due à ceux qui restent debout, continuant dans la paix de leur âme l’œuvre de dévouement et de vérité à laquelle ils ont consacré leur existence.

          F. Goyen



Le Réveil du Finistère (11 avril 1908)



——————
L’affaire de la chapelle du Lycée
———

L’émotion soulevée par l’affaire de la chapelle du lycée est loin d’être calmée, et sa répercussion occasionnera certainement des conséquences tout à fait inattendues.

Suivant des bruits intéressés il serait question de faire déclarer l’irresponsabilité du prévenu ; ce serait cependant trop commode de terminer de cette façon une aussi grave affaire. Pour tout le monde il est à souhaiter que la lumière entière se fasse et aussi impartialement que possible.



Le Progrès du Finistère (11 avril 1908)



ASSISES DU FINISTÈRE
______
2e session de 1908.
______
Présidence de M. le Conseiller GASPAILLART
______
Audience du vendredi 3 Avril.

L’instituteur Coat acquitté.


Affaire de mœurs. — L’instituteur public de Gouesnou, M. Pierre-Marie Coat, âgé de 54 ans, est poursuivi pour affaire de mœurs.

Les débats de cette affaire ont lieu à huis-clos.

Ministère public : M. le substitut Brohan.

Défenseur : Me Maurer, du barreau de Brest.

M. Pierre-Marie Coat est acquitté.


[……]


Nouvelles départementales
_________


[……]

Nous apprenons, au dernier moment, que M. l’abbé Bulot, qui avait disparu dans l’après-midi d’hier, a été retrouvé ce matin, noyé dans le puits de son jardin, d’où il a été retiré, vers 10 h. 1/2, par M. Le Bras, ferblantier, place de Brest. Ce déplorable accident est dû, incontestablement, à un accès de folie.

Déjà dans la matinée d’hier, l’état de santé de M. Bulot donnait de très graves inquiétudes à tous ceux qui l’ont vu.

Des racontars odieux et sans aucun fondement se colportaient autour de lui. On le disait, absolument à tort, sous la surveillance de la police. Les échos de ces calomnies, parvenant jusqu’à lui, ont eu raison du calme qu’il y avait d’abord opposé.

La responsabilité de ceux qui ont mis ces bruits en circulation est très grave. La folie de M. Bulot et sa mort sont leur œuvre.



Cherbourg-Éclair & Réveil Maritime (15 avril 1908)



SUICIDE D’UN PRÊTRE


À Quimper, on a retrouvé le cadavre de l’abbé Bulot, prêtre libre à Quimper, qui s’est suicidé en se jetant dans un puits.

L’arrestation, la semaine dernière, de l’aumônier du lycée avait causé de l’inquiétude à l’abbé Bulot, et c’est à ce motif qu’on attribue son suicide.



Le Réveil du Finistère (18 avril 1908)



——————

Suicide. — L’abbé Bulot de Quimper, s’est suicidé. Ça peut arriver à tout le monde ; et cet incident serait passé tout à fait inaperçu si la presse réactionnaire n’en eût fait suivre l’annonce de commentaires très équivoques pour la mémoire du défunt. Le Progrès rapporte que « des racontars odieux et sans fondement se colportaient autour de lui. On le disait, absolument à tort, sous la surveillance de la police, etc. ». Et L’Indépendant ajoute pour sa part que « c’est à la suite de bruits tendancieux répandus contre lui que, dans un accès de folie, M. Bulot aurait pris sa funeste détermination ».

Voici, en vérité, qui n’est pas charitable, et nos confrères semblent laisser planer sur le disparu des choses épouvantables ! C’est bien mal, mes amis, d’oublier la charité chrétienne.



La Démocratie bretonne (25 juillet 1908)



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L’Affaire du Lycée

Nos lecteurs se souviennent qu’il y a trois mois, l’aumônier du lycée fut arrêté en flagrant délit d’attentat à la pudeur dans la chapelle de cet établissement. Une instruction fut ouverte. L’aumônier, après avoir avoué les pratiques auxquelles il se livrait depuis vingt ans, vient de bénéficier d’une décision le déclarant irresponsable. En conséquence, il a été interné à l’asile d’aliénés de Quimper.



Voir aussi

Sources

  • « À Quimper – Un scandale clérical : dans une chapelle : scènes dégoûtantes : en flagrant délit : arrestation de l’abbé Thomas, aumônier du lycée » / in Le Réveil du Finistère : organe hebdomadaire d’action républicaine, samedi 4 avril 1908, p. 2, col. 3-4. – Quimper : Le Réveil du Finistère, 1908.
  • « La robe du prêtre » / F. Goyen ; in Le Progrès du Finistère, n° 58, samedi 4 avril 1908, p. 1, col. 1-2. – Quimper : Le Progrès du Finistère, 1908. – 6 p.
  • « L’affaire de la chapelle du lycée » / in Le Réveil du Finistère : organe hebdomadaire d’action républicaine, samedi 11 avril 1908. – Quimper : Le Réveil du Finistère, 1908.
  • « Assises du Finistère, 2e session de 1908, présidence de M. le Conseiller Gaspaillart, audience du vendredi 3 avril – L’instituteur Coat acquitté » ; « Nouvelles départementales » / in Le Progrès du Finistère, n° 59, samedi 11 avril 1908, p. 2, col. 5 et 6. – Quimper : Le Progrès du Finistère, 1908. – 6 p.
  • « Suicide d’un prêtre » / in Cherbourg-Éclair & Réveil Maritime : journal démocratique de la Manche, n° 2780, mercredi 15 avril 1908, p. 1, col. 2. – Cherbourg : Cherbourg-Éclair, 1908.
  • « Suicide » / in Le Réveil du Finistère : organe hebdomadaire d’action républicaine, samedi 18 avril 1908. – Quimper : Le Réveil du Finistère, 1908.
  • « L’affaire du lycée » / in La Démocratie bretonne : organe hebdomadaire d’action républicaine et sociale, n° 231, samedi 25 juillet 1908. – Quimper, 1908.

Articles connexes