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Version du 22 mars 2016 à 19:17

Texte précédent : L’érotisme n’est pas un violon d’Ingres

Interview de Tony Duvert par Jean-François Josselin dans le n° 430 du Nouvel Observateur (5/2/1973).


Tony Duvert, vingt-huit ans, entré dans la bibliothèque sur la pointe des pieds il y a cinq ans, explose aujourd’hui. Dans une nouvelle revue, « Minuit », dont il est l’animateur avec le dessinateur-peintre Michel Longuet, il met en pièces le monde et le commerce de l’édition, les relations et interpénétrations entre celle-ci, le public bourgeois et l’auteur.

Dans les couloirs de son éditeur, il pulvérise le Duvert légendaire : Genet ? Il l’horripile, c’est un « auteur qui fleurit son derrière »… Le Nouveau Roman (qui a vu le jour, s’est épanoui, vieillit bien aux éditions de Minuit) ? Il éprouve une « grande aversion » pour l’art de Robbe-Grillet et de Michel Butor. La protection d’anonymat orchestrée par Jérôme Lindon autour de ses quatre premiers livres ? Il s’agissait surtout, déclare-t-il, d’une timidité de celui-ci devant des ouvrages sexuels. Lui, Tony Duvert, n’a pas de réticence.

Il se proclame « écrivain » : « Le meilleur état social pour un homosexuel. » Il déteste la littérature romanesque traditionnelle (en fait, il ne sauve, au cours de la discussion, que Proust, Céline et Beckett) parce qu’elle « refuse le corps ».

« Ce qui existe, dit-il encore, c’est le discours. Mais le discours lui-même n’est rien, il est au service du corps. L’écriture est solidaire de la vie amoureuse. Elle incite à aller plus loin. Et puis l’écriture, c’est la liberté infinie : comme les enfants qui jouent à être des Indiens, je joue à être un bourreau. »


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