« Paysage de fantaisie (3) » : différence entre les versions
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Dernière version du 8 avril 2016 à 18:55
et si vous pensez qu’ils ne sont pas respectés,
veuillez le faire savoir à la direction de BoyWiki,
qui mettra fin dès que possible à tout abus avéré.
quand c’est deux heures on va s’asseoir ils prennent des piles d’illustrés et des sacs de bonbons ils baissent leur froc et s’installent sur les chaises bien graissées on ne se relève que pour aller au cabinet ça dure jusqu’à six heures les chaises sont alignées dans la grande pièce du haut près du studio de photographie un type reste avec nous pour vérifier qu’on ne fait pas semblant mais on n’essaie pas de faire semblant parce qu’avec les chaises et leur bâton on a moins mal d’être enculé on nous encule l’après-midi ou le soir ensuite on est libre sauf certains qui s’en vont pour la nuit les clients sont très riches ils invitent même des garçons en vacances tout le monde est très riche à part nous
moi je ne savais pas lire je m’endormais sur ma chaise au bout d’une heure je faisais des rêves le type venait m’attacher pour que je ne tombe pas il n’empêche pas de dormir on nous traitait bien jamais un coup jamais une punition et les friandises à volonté le matin on se balade où ça nous plaît dans la campagne il faut rentrer avant deux heures il y a toujours à manger c’est qu’on aime manger et personne ne se sauve je me serais sauvé au début mais on me surveillait trop il n’y a que les premières semaines de dures après on commence à se trouver content on ne travaille pas tous les jours ils organisent un roulement c’est un jour sur trois pour les petits et un sur deux pour les plus grands on ne passe aux chaises que les jours où on travaille sinon on n’y va pas sauf les nouveaux qui ne sont pas assez desserrés eux ils s’assoient deux heures ils ont fini à quatre au goûter nous on les baise sans arrêt la nuit on jouit bien on s’amuse mieux qu’avec les clients ils ne rient pas ils sont gras et tristes poilus pesants ils ne nous touchent pas tellement la pine c’est nos fesses alors oui nos bouches oui bien sûr on ne se fatigue pas trop vraiment le petit Yann est amoureux
c’est un Breton il a la tête toute ronde et il collectionne les bateaux quand on sera grand il faudra s’en aller je n’aurai plus que la rue et cette ville loin d’ici que je détestais
il m’a embrassé deux fois en vitesse je me moque de lui il construit un bateau dans une bouteille deux jours par semaine sur la chaise spéciale tant on s’ennuie je l’ai dit au mec Vise-moi le cul j’ai plus besoin de me faire élargir pourquoi que je suis obligé de m’asseoir avec les autres Ça te fait les pieds il dit les pieds c’est pas pour les pieds j’irai plus tu entends et ils me courent tous ces nœuds on est pas en prison
attends encore un an on te jettera dehors tu vas nous regretter
peuh j’irai à la ville j’aurai des femmes
il essaie aussi de fabriquer un bateau volant mais ça ne marchera pas c’est tordu son truc y a des moteurs dans tous les sens j’aime mieux les voiles il décolle bien mais il retombe à cause des moteurs tout ce poids et cette fumée ça marche à l’essence à briquet on l’entend d’ici quand il l’essaie sur la rivière en bas derrière le pont près du lavoir
sur la pointe des pieds je me suis dressé j’ai embrassé deux fois ses belles joues
une chaise avec une grosse cheville qui en sort et ils t’assoient dessus tu vas pas bien il ne me croit pas je lui montrerai mon cul il racontera que je me fais mettre sans arrêt dans les champs pourtant c’est pas les filles qui manquent sur les chemins et dans leur trou de bite elles ont pas de merde
j’ai changé de chemise pour venir le voir et j’avais des fleurs à la main que je n’ai pas osé lui offrir elles étaient trop vilaines il aurait ri les petits-beurre dans ma poche se sont cassés quand il m’a bousculé je suis tombé j’ai pleuré j’ai eu une bosse derrière la tête on me met de l’arnica on dit C’est encore eux on le dira au directeur ces orphelins sont des voyous pauvre biquet pauvre petit des mamans par ici ça court pas les rues encore heureux on saurait plus où se cacher les messieurs du soir suffisent bien côté lèche et les sœurs du dispensaire pour l’arnica le mercurochrome les gouttes dans le nez
près du studio la grande salle noire servait de cinéma ils avaient muré la fenêtre et les chaises étaient fixées en rang par de longues barres clouées au dossier on s’assoit on regarde les films qui sont muets c’est nous qu’on rit
t’en as de la chance ils en ont des sous les gens qui vous en avez du temps pour vous amuser nous des punitions on en a toujours moi l’école j’en ai marre on en a jamais des films
ces paroles-là et puis d’autres dans mon sommeil l’après-midi l’étouffante chaleur d’août les phrases murmurées se noient cotonneuses molles et brusquement s’élèvent se précisent déchirent ma torpeur je secouais ma tête lourde je me réassoupissais on me tournait doucement de côté quelque chose entrait avec méchanceté dans mon derrière le suppositoire de trois heures si c’est aromatique et gras le thermomètre de cinq heures si ça pique et toujours des ongles aigus me blessant le trou pour l’écarter ensuite je n’étais plus malade et les puanteurs de pharmacie s’envolaient un tintement de papier d’étain déchiré et l’odeur très fraîche du chocolat qu’on sort de son emballage
dis eh chose tu m’en files un bout ?
t’occupe pas roupille il me prend la main Touche voir touche un peu alors c’est des rillettes ? il pliait le bras et serrait le poing pour gonfler son biceps Moi je suis un balaise toi t’es un minus a-t-il expliqué je me mets sur l’autre côté j’ai encore mal je ne me rendors pas le suppositoire me brûle ça sent le caca le beurre de cacao et le camphre sous mes draps moites ils n’ouvrent pas la fenêtre le soleil du printemps le vent du printemps toutes les matinées tous les parfums le garçon qui est blond m’apporte à midi un œuf à la coque de la mie de pain beurrée et un bol de bouillon de poulet au vermicelle il me regarde manger il a un bon sourire il a trouvé un papillon noir avec des cocardes arc-en-ciel comme un avion il me le montre et le laisse voler dans la chambre il me dit que c’est chic d’être malade
moi ce matin on m’a fait gratter le grand bassin tu sais le truc en caillasse devant la roseraie c’est pour les poissons rouges cet après-midi on va allumer le jet d’eau pour le remplir pour mettre les poissons ça sera bien hein l’eau c’est beau moi ça me donne soif pas toi ?
on me lèvera quand ?
je sais pas sûrement demain les voix du dedans et celles du dehors puis ma tête tombait je m’endormais un peu la sieste chaque après-midi on se tue les nerfs on s’embête à crever et personne n’ose chahuter à cause du surveillant qui gifle impossible de garder si longtemps les bras les jambes immobiles au même endroit volets fermés où le soleil tape il faut attendre mais les plus hardis bavardent à voix basse on a trop chaud sous le toit Yann a le droit de continuer son bateau on sent la colle et le bois qu’il découpe
celui que j’aime m’a donné un coup de coude et m’a demandé si je me branle avec un coupe-cigares ou dans un capuchon de stylo j’ai rougi j’ai dit avec les pinces à vélo de ma grand-mère il l’a répété au mec du lit à côté Eh tu l’entends le minus les pinces à vélo de sa grand-mère il est farce hein on croirait pas à le voir et j’ai encore rougi mais de fierté je me suis penché sur l’oreiller j’ai embrassé sa belle joue
ça y est il recommence il est vraiment tapé à m’embrasser comme ça ho Yann tu bouscules merde
c’est une papette ce type je te parie mais celui que j’aime a serré les poings il m’a jeté un regard furieux son front transpirait et collait une grande mèche en spirale j’ai eu peur de ses beaux yeux gris un gris souris verte comme la chanson des petits dans l’herbe du jardin ils font des rondes et s’amusent avec une petite balle au mur c’est encore des filles moi je n’ en suis plus j’ai un cerceau un bateau un château des autos des dominos un diabolo un meccano un pipeau un lasso un yoyo un loto des chevals mécaniques il prend mon yoyo pour faire des soleils et j’en frissonne de plaisir jusqu’à la nuque on commence tout par le pire j’étais d’abord gâteux
on jouait à faire semblant quelquefois lorsqu’on se retrouvait au dortoir on se couchait notre lit énorme qui se voit de loin ses grandes boules jaunes brillantes et mes maquettes de bateau accrochées partout pour la décoration nous deux au milieu le rentre-dedans la rigolade
Yann s’agite sur mon dos comme s’il me niquait et les autres se bidonnent mon chéri mon amour suce-moi mon amour mon chéri tu es beau je voudrais te baiser les garçons l’écoutent ils remontaient un à un des salons où ils avaient tronche avec les vieux et ils s’approchaient se réjouissaient lui talochaient les fesses le déculottaient jusqu’en bas mon chéri mon amour ça serre pas assez mon amour mon chéri serre le cul sa petite croupe allait venait toute blanche me recouvrant les mioches en grappe autour de nous parodiaient Mon chéri mon amour ! ils pouffaient de rire J’voudrais t’baiser ! ils s’en tapaient sur les cuisses ils s’en étranglaient Ça serre pas assez ! ils se faisaient les grimaces de quand on serre les fesses ils tombaient à la renverse Mon amour mon chéri ! T’es belle ! ça les crevait ils encourageaient Yann Allez cravache beau jockey cravache ! ils s’en fendaient la gueule de nous voir ils me demandaient C’est à la course ou à l’heure bourgeois ? et Yann bandait et pinait contre mon froc et me mouillait de rire dans le cou ils criaient C’est pas trop noir là-dedans allume ton phare au bout du nœud ! ils étaient écroulés Yann à son tour était le cheval je le grimpais je gardais la braguette fermée je frottais son cul nu les moutards se tordaient ravis épatés ça continue c’était trop beau je cognais dur avec les reins il protestait se remettait à plat dos j’imitais de l’enfiler par-devant mon grand chéri mon petit amour il en pouvait plus de se boyauter les cannes en l’air ma braguette lui râpait l’entrejambe de plus en plus fort il protégeait ses burnes avec la main Fais gaffe à l’omelette tu me les casses mais c’était un murmure pour moi seul je me penchais embrasse-moi j’allais jouir embrasse-moi les autres répétaient Ben alors embrasse-le qu’on te dit ! ils étaient rouges suants de marrade ils s’entassaient les uns sur les autres se pinçaient se boxaient se tiraient par les pieds tombaient se relevaient retombaient se débraillaient s’emmêlaient bras jambes culs doigts et figures mélangés bites raides malmenées par les chutes mon grand chéri mon petit amour Yann devinait à ma tête que je jouissais pour de bon je les aurais tués leurs mains sales sur les draps leurs cris suraigus leur culotte chaude d’envie de pisser je me relevais essoufflé chaviré le ventre visqueux ils hurlaient Il a gagné vive lui !
en bande braillante ils traversent le village presque chaque matin ils entrent à dix ou quinze chez l’épicière achètent des confiseries et en chapardent dès qu’ils passent je me range à l’abri sous un porche ou dans un chemin creux ou derrière l’église parce qu’ils ont l’habitude de m’envoyer des coups de pied je ne les entends pas d’assez loin et j’ai trop de peine à marcher il y en a toujours qui m’aperçoivent ils me font tomber ils me savatent et s’enfuient ils ont tué mon chien l’an dernier en le désarticulant chacun une patte qu’ils ont tordue et fait craquer je réentends ses hurlements sous la torture je l’ai ramassé dans mon sac c’était un petit chien noir de cinq mois que j’avais recueilli quand on allait l’abattre je l’ai laissé pourrir contre moi je dormais dans les bois c’est l’été où il a beaucoup plu j’ai peur d’eux ils sont plus forts que moi ils me démoliraient s’ils en avaient envie ils préfèrent me tourmenter sauf quand ils m’ont traîné par les pieds dans un champ j’ai cru que c’était la fin ils m’ont entassé des chaumes dessus et les ont enflammés le propriétaire les a chassés à coups de fusil il en a blessé un à la jambe qui en boite pour toujours on a soigné mes brûlures à l’hospice c’est un couvent sur la route du pont le petit y était aussi mais je ne l’ai pas vu les sœurs me l’ont décrit méchant comme une teigne et sa jambe resterait tordue j’aimerais mieux que le village soit abandonné je mourrais heureux je me chaufferais au soleil dans ces ruines de pauvreté tant qu’il y aura des portes et des gens derrière je continuerai d’avoir peur
à la fin de la journée après le thermomètre Claude revient il a des petits radis dans sa poche il les croque un par un il s’installe à côté de la fenêtre il dit Je suis bien ici et il lit un livre il n’est pas comme les autres un monsieur venait exprès pour lui et se le réservait en payant cher car il paraît que Claude est très beau c’est un client qui n’enculait pas et Claude n’était jamais de corvée de chaise l’homme était grand laid toujours en pardessus et en chapeau triste Claude ça lui glissait dessus ce n’était que deux fois la semaine C’est quoi que tu lis ? ma question lui fait plaisir il lève les yeux Je l’aurai fini demain je te le raconterai on voit sur la couverture cartonnée un dessin en couleurs qui montre un garçon comme Claude et une tempête derrière lui avec un bateau noir qui fume au loin c’est sûrement bien il a de la chance j’ai moins de fièvre ce soir et mes pieds frétillent j’ai faim je n’ai pas froid ma peau est fraîche c’est le printemps qui me guérit les voix heureuses que j’entends
la gossaille des environs traîne dehors maintenant qu’il fait soleil ils ont un peu changé depuis l’été dernier les bébés marchent les petits parlent les moyens se battent les grands apprennent à fumer Bernard réparait son vélo neuf il l’a eu pour ses douze ans un pneu avait crevé il porte le même chandail qu’à l’automne mais plusieurs centimètres de poignet nu séparent la main et le bout de la manche c’est ce qui a poussé pendant six mois et qui dépasse de plus en plus il met encore une culotte courte et peut-être ses belles jambes sont plus découvertes qu’en septembre et son derrière plus moulé mais ses fesses habitent toujours bien ce qui les couvre même de trop grand elles y bougent comme deux tortues sous des feuilles de salade il y a des morts dont la bouche le nez les oreilles le nombril font éclore des roses un lis des prières écrites sur leurs pétales ou aussi de grands arbres un jardin parfumé des clairs de lune enchanteurs le cimetière végète sans grâce et il sent le puisard personne n’y viendra je reste assis par terre
personne ne me recueillerait plus aujourd’hui je dégoûterais trop les passants mon teint noir œil rongé nudité ballonnante peau diaphane où circulent des courants jaunes et là où devrait pendre un sexe j’ai une longue balafre écarlate en travers de mes poils elle suinte une pisse huileuse qui écœure même les vers mes doigts seuls s’agitent et cherchent à toucher ce qui s’approche les cerisiers et les pêchers ont commencé à fleurir les gamins secouent ces neiges roses et blanches quand ils passent sous les arbres et l’emballage du chocolat renferme une image où des papillons à l’aquarelle butinent les boutons d’or et le lilas il n’y en aura plus à la Toussaint lorsque nous irons au cimetière pour voir comme chaque année si le vieux qui s’y réfugie peut oui ou non être couvert de terre mais c’est toujours trop tôt à notre idée ils nous paraît vivant et on le laisse encore quatre saisons s’il ouvre ce qui lui reste d’yeux il doit voir un soleil pourri moi je l’ai aperçu se doucher de pétales sous un églantier bas et de grosses tiques se sont mises à ses cheveux
autrefois les grilles furent peintes et le jardin soigné deux vieilles femmes ont habité là en émiettant du pain aux oiseaux puis l’ogre les a mangées il y avait une terrasse sablée devant la roseraie que fermait une balustrade romantique et des dames en toilette blanche y surveillaient sous des ombrelles quelques enfants joueurs qui de courir avaient perdu leur chapeau à ruban
probablement ils ne sortaient pas les jours de pluie et on ne savait rien il fallait le soleil et les fleurs pour que ces fantômes apparaissent et alors personne n’osait plus prendre le chemin qui conduisait par là
il rentre de la ville en fin de semaine il retrouve le grand pavillon sur les hauts du village le parc sa femme et ses enfants il distribue les baisers les cadeaux les ordres et les nouvelles on grimpe sur ses genoux on lui montre à la balustrade le val les bois et la rivière on tue un lapin ou un canard pour son dîner puis on couche les petits et il soumet sa femme au devoir conjugal il réclame qu’elle le suce comme les filles de Bordeaux ou qu’elle ôte sa chemise de nuit pour montrer tout comme les catins d’Angoulême ou qu’elle crie foutre-dieu en jouissant comme les grognasses du Périgord elle goûtait les romans elle gardait les anglaises blond vénitien de son enfance dans un coffret tissu d’autres cheveux je remonterais jusqu’à l’âge des cavernes en suivant leurs nostalgies à chacun j’ai préféré une maison close je choisis ce chapeau gris et je prends la route j’y serai dans deux heures l’établissement est en province une belle demeure vendue à perte parce que des crimes sadiques y avaient eu lieu le coupable eut la tête coupée devant les journalistes c’était une très grande punition ici on nous prive seulement d’éclairs au chocolat ou de baignade après la sieste
cet été ils auront l’autorisation de construire deux murs en travers de la rivière pour fermer la baignade il y aura une écluse et un filtre on ne craindra plus les serpents les insectes d’eau douce ou les noyades c’est déjà maçonné sur quinze mètres de rive on aura comme une piscine dans une prairie on s’y plaira beaucoup malgré les vaches qui viendront boire avec leurs mouches et leurs bouses que le soleil croûte on se déshabillait sous les arbres il se cachait derrière moi pendant qu’il enfilait son petit maillot de bain jaune vif on a de longues planches de la scierie comme bateaux on les lance on les rattrape on les chevauche à plusieurs et les plus grosses tiennent un moment avant de couler sous le poids ici le fond de la rivière est sablonneux et il y a un grand mètre d’eau très fluide et froide qui nous creuse le ventre quand on y pénètre
il m’embête avec ses rendez-vous au lavoir après dîner il y aura de l’orage j’ai la flemme le ciel est sombre je n’irai pas
pour lui j’ai champouigné mes beaux cheveux