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{{Citation longue|Serge supporte la tête de Jonathan posée sur ses cuisses comme un chat en boule.
{{Citation longue|Et il y eut, avec chacun une torche à piles, les rondes de nuit. Cette campagne ingrate en
D’abord il la touche, la grattouille, la câline. Ensuite il se met à grattouiller un peu trop, à la
devenait belle ; et on se sentait tout permis.
balancer excessivement, à lui piquer l’oreille avec un cheveu. Jonathan s’y résigne et se
 
relève. C’est peut-être mieux ainsi.}}<br>
Jonathan connaissait assez bien les chemins des environs, les prés, les cours d’eau, les
bois, pour qu’ils n’aient pas à craindre de se perdre. Mais Serge n’entendait pas se laisser
conduire. Bientôt surexcité, surtout dès qu’ils atteignaient un bout de forêt, il échappait à
Jonathan et partait en exploration. Il n’était pas peureux ; il communiquait vite son
enthousiasme à Jonathan, pour qui les prestiges de la forêt ou de la nuit étaient éteints depuis
longtemps — et qui pourtant se reprenait au jeu, au point d’avoir peur tout seul, dès qu’il
cessait d’apercevoir la lumière du petit garçon danser dans l’obscurité.
 
Serge se plaisait à une sorte de cache-cache. Il disait :
 
— Toi, tu vas par là, moi par là. On marche jusqu’à mille ! Tu vois, t’es pas forcé de
compter vraiment. Tu t’le dis en gros ! Après on revient. Mais on a pas le droit de cacher la
lampe ! C’est le premier qui t’voit, il gagne.
 
L’enfant eut bientôt la malice de grimper à un arbre. Il laissait Jonathan disparaître,
escaladait les branches jusqu’à la hauteur où l’on vacille et où les étoiles se découvrent, puis
le ciel entier. Et l’air était frais, là-haut ! Alors, il appelait Jonathan d’une voix très forte : mais
il avait éteint sa lampe, qu’il reliait avec de la ficelle à un passant de culotte.
 
Après un moment, Jonathan, un peu désemparé, mal guidé par les appels, approchait.
Serge ne voyait pas sa lampe, n’entendait pas même ses pas : mais la voix du jeune homme se
faisait nette.
 
— Allez ! où j’suis ? criait Serge, ravi, quand il devinait sa victime à quelques pas de
l’arbre.
 
Des affleurements rocheux à petites cavernes, un ruisseau assez propre qu’on atteignait
en escaladant deux clôtures puis en se glissant sous des barbelés, servirent à des jeux
semblables. Serge n’y renonçait qu’une fois très fatigué, et c’est seulement là qu’il proposait
qu’on rentre. Il pouvait être onze heures ou minuit. Restait, souvent, un long chemin à faire,
en se perdant, se retrouvant. L’enfant traînait un peu la patte, mais sa gaieté ne le quittait pas.
Il échafaudait des idées pour le lendemain soir.}}<br>
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Et il y eut, avec chacun une torche à piles, les rondes de nuit. Cette campagne ingrate en devenait belle ; et on se sentait tout permis.

Jonathan connaissait assez bien les chemins des environs, les prés, les cours d’eau, les bois, pour qu’ils n’aient pas à craindre de se perdre. Mais Serge n’entendait pas se laisser conduire. Bientôt surexcité, surtout dès qu’ils atteignaient un bout de forêt, il échappait à Jonathan et partait en exploration. Il n’était pas peureux ; il communiquait vite son enthousiasme à Jonathan, pour qui les prestiges de la forêt ou de la nuit étaient éteints depuis longtemps — et qui pourtant se reprenait au jeu, au point d’avoir peur tout seul, dès qu’il cessait d’apercevoir la lumière du petit garçon danser dans l’obscurité.

Serge se plaisait à une sorte de cache-cache. Il disait :

— Toi, tu vas par là, moi par là. On marche jusqu’à mille ! Tu vois, t’es pas forcé de compter vraiment. Tu t’le dis en gros ! Après on revient. Mais on a pas le droit de cacher la lampe ! C’est le premier qui t’voit, il gagne.

L’enfant eut bientôt la malice de grimper à un arbre. Il laissait Jonathan disparaître, escaladait les branches jusqu’à la hauteur où l’on vacille et où les étoiles se découvrent, puis le ciel entier. Et l’air était frais, là-haut ! Alors, il appelait Jonathan d’une voix très forte : mais il avait éteint sa lampe, qu’il reliait avec de la ficelle à un passant de culotte.

Après un moment, Jonathan, un peu désemparé, mal guidé par les appels, approchait. Serge ne voyait pas sa lampe, n’entendait pas même ses pas : mais la voix du jeune homme se faisait nette.

— Allez ! où j’suis ? criait Serge, ravi, quand il devinait sa victime à quelques pas de l’arbre.

Des affleurements rocheux à petites cavernes, un ruisseau assez propre qu’on atteignait en escaladant deux clôtures puis en se glissant sous des barbelés, servirent à des jeux semblables. Serge n’y renonçait qu’une fois très fatigué, et c’est seulement là qu’il proposait qu’on rentre. Il pouvait être onze heures ou minuit. Restait, souvent, un long chemin à faire, en se perdant, se retrouvant. L’enfant traînait un peu la patte, mais sa gaieté ne le quittait pas. Il échafaudait des idées pour le lendemain soir.


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