« Tombeau pour 500.000 soldats (extrait 2) » : différence entre les versions
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Dernière version du 13 avril 2020 à 18:58
L’extrait ci-dessous de Tombeau pour cinq cent mille soldats de Pierre Guyotat, édité en 1967 par Gallimard, évoque le chef qui rôde pendant la nuit à la recherche de marmitons dociles.
Le chef et les marmitons
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Au milieu de la nuit, il se lève, il rôde le long de ma porte ; les femmes fuient ; alors il se précipite dans la cour, la boucle de son ceinturon délacé étincelle sur sa hanche, sa chemise ouverte est soulevée par le vent, il descend aux cuisines, s’empêtre dans les rideaux des alcôves, avance, courbé, dans l’ombre, tâtonne, touche les paillasses où dorment, nus ou entortillés dans les tabliers, les marmitons, les jeunes cuisiniers ; sa main saisit un pied, la jambe, remonte sur la cuisse, empoigne le sexe, le garçon se réveille, il se dresse sur son séant, il recule vers le haut de la paillasse, mais le chef lui tire le sexe, retient le garçon assis au milieu de la paillasse : « Viens, sors, viens, que je te voie. » Il lâche le sexe du garçon, il ouvre et referme sa main mouillée de sueur, il l’enfonce dans sa poche, le garçon se lève, marche sur la paillasse, un rayon de lune traverse le rideau, éclaire le ventre du garçon, fait tourner l’ombre du nombril ; le garçon soulève le rideau, il s’avance dans la cuisine, le chef le prend par les épaules, il le pousse vers le soupirail, le garçon appuie son dos au mur, le salpêtre coule le long des vertèbres jusqu’au haut des fesses ; sa tête renversée, yeux mi-clos, sur l’épaule, le chef la relève, il caresse les muscles tendus de la gorge et du cou, ses yeux s’abaissent vers le ventre, le sexe froissé, les cuisses, la lueur des genoux ; il prend la main du garçon, il l’entraîne hors des sous-sols, dans la cour, le vent empoigne le garçon ensommeillé, sa tête roule en arrière, en avant, ses yeux grands ouverts débordent de lune ; dans la chambre du chef, de nouveau le sommeil le prend, le ramollit, attendrit la peau de son corps cuivré ; toute la nuit, jusqu’à l’aube, le chef, pleurant, criant, soulève, retourne, entrouvre, soutient, écrase ce corps endormi dont un seul soupir, au moment de l’orgasme, s’élève dans la pénombre et le désordre des draps.
Voir aussi
Édition utilisée
- Tombeau pour cinq cent mille soldats : sept chants / Pierre Guyotat. – Paris : Gallimard, 1967 (Saint-Amand : Impr. Bussière). – 496 p. ; 21 × 14 cm. – (Le chemin).
P. 19-20.