La pédophilie en question (texte intégral) – II-1
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Nota : Les dispositions légales évoquées dans les trois chapitres de cette partie « Juridique » étaient valables en 1987. Depuis cette date, les lois françaises, néerlandaises et italiennes ont été modifiées sur de nombreux points, parfois de manière très importante.
Chapitre précédent
SELON LE DROIT FRANÇAIS
I. - AVANT QUINZE ANS
Le Code Pénal de 1810, élaboré sous Napoléon Ier, n’avait pas réprimé l’attentat à la pudeur sans violence.
Cette répression intervint par l’ordonnance royale du 28 avril 1832 qui prévoyait une sanction lorsque le délit avait été commis sur la personne d’un enfant de moins de onze ans.
La loi du 13 mai 1863 fixa à treize ans le seuil à partir duquel il n’y avait plus d’attentat à la pudeur, avec une exception : les ascendants étaient toujours condamnables pendant la minorité de leur enfant, soit jusqu’à vingt et un ans.
M. de Belleyme, rapporteur de la loi, expliquait : « S’il est permis de supposer une volonté intelligente et libre chez un enfant de plus de treize ans, cette volonté n’est plus certaine si la sollicitation lui arrive d’un de ses ascendants, c’est-à-dire d’une personne qui exerce sur lui une autorité naturelle. »
L’ordonnance du 2 juillet 1945 fixa à quinze ans le nouveau seuil toujours en vigueur.
L’article 331, du Code Pénal, dans la section « Attentats aux mœurs », prévoit « l’attentat à la pudeur commis ou tenté sans violence ni contrainte ni surprise sur la personne d’un mineur de quinze ans ».
L’attentat à la pudeur sans violence est un acte qui n’est lié à aucune violence physique ou morale. La jurisprudence des tribunaux a tenté de le définir : il s’agit de tout acte immoral de l’ordre sexuel auquel la victime se trouve mêlée.
Il faut un acte d’une certaine gravité opérant un contact physique entre le mineur et l’auteur : relation sexuelle, pratiques homosexuelles, baisers, caresses, attouchements…
Peu importe :
— que le mineur soit consentant (Cour de Cassation, Chambre Criminelle, 5 novembre 1881) ;
— le caractère public ou privé de l’acte ;
— l’influence démoralisante ou non que l’acte a pu exercer sur la victime ;
— le rôle actif ou passif que la victime a pu jouer dans l’attentat (Cour de Cassation, Chambre Criminelle, 24 juillet 1874).
La tentative est punissable comme le délit.
La poursuite devant les tribunaux peut se traduire ainsi :
1. – Le mineur et son partenaire ont entre treize et quinze ans : ils peuvent être tous les deux poursuivis devant le Tribunal pour Enfants.
2. – Si le partenaire a entre quinze et dix-huit ans, le mineur de moins de quinze ans ne sera pas poursuivi, mais son partenaire peut l’être devant le Tribunal pour Enfants.
Cette infraction est punissable d’un emprisonnement de trois à cinq ans et d’une amende de 6 000 à 60 000 francs, mais il faut savoir que la peine encourue est divisible par deux lorsqu’il s’agit d’un inculpé qui n’a pas dix-huit ans.
3. – Si le partenaire du mineur a plus de dix-huit ans, la peine n’est plus divisée par deux.
4. – Si l’attentat à la pudeur sur un mineur de quinze ans est réalisé par un ascendant ou une personne ayant autorité sur lui, l’auteur de l’infraction peut être condamné de cinq à dix ans de prison et à une amende de 12 000 à 120 000 F (article 331, alinéa 2, du Code Pénal).
L’auteur de l’infraction a dans tous les cas la possibilité de démontrer qu’il a commis une erreur sur l’âge de la victime (Cour de Cassation, Chambre Criminelle, 7 février 1957).
Pour la définition de l’ascendant et de la personne ayant autorité sur le mineur, voir le paragraphe suivant.
II. – À PARTIR DE QUINZE ANS
Il existe une relative majorité sexuelle à partir de l’âge de quinze ans. Notons pour mémoire que le Code Civil (articles 144-145) stipule que l’homme avant dix-huit ans révolus, la femme avant quinze ans révolus, ne peuvent contracter mariage (sauf dispense accordée par le Procureur de la République pour motif grave). Ceci n’empêche que les relations sexuelles, quelles qu’elles soient, sont autorisées pour les mineurs de plus de quinze ans, tant garçons que filles. Cependant, elles sont limitées à certains partenaires.
En effet, il y a attentat à la pudeur sans violence lorsque le partenaire du mineur non émancipé par le mariage est un ascendant légitime, naturel ou adoptif, ou une personne ayant autorité sur lui ou ayant abusé de son autorité. La peine encourue alors par la personne est de six mois à trois ans de prison et de 1 000 à 20 000 francs d’amende (article 331-1 du Code Pénal).
Cet article s’étend à toutes les personnes qui ont une autorité soit de droit soit de fait.
Ceux qui ont une autorité de droit :
Il y a les ascendants nommés par l’article 331-1 : le père, la mère, légitimes, adoptifs, naturels, mais aussi les grands-parents. Ne sont pas compris les ascendants par alliance. Les personnes ayant autorité de droit peuvent aussi être, par exemple, les tuteurs nommés par la loi. En ce cas, le tribunal constatera seulement, dans son jugement, que l’accusé avait la qualité dont il s’agit.
Une autre grande catégorie de personnes, désignées par le texte, sont celles qui exercent une autorité de fait. Ce sont des éducateurs au sens large, des maîtres ou patrons, des prêtres, des agents de la force publique… La liste n’est pas exhaustive.
Le jugement prononçant l’attentat à la pudeur doit alors spécifier les circonstances particulières qui fondent cette autorité.
Si le mineur n’est pas consentant :
Le Code Pénal punit de peines aggravées, à savoir la réclusion criminelle de dix à vingt ans, le viol commis soit sur un mineur de moins de quinze ans, soit quel que soit l’âge de la victime par tout ascendant ou personne ayant autorité sur elle (article 332, alinéa 3 du Code Pénal).
Le viol sur un mineur de quinze ans et plus est puni lui de la réclusion criminelle de cinq à dix ans (article 332, alinéas 1 et 2 du Code Pénal).
Par viol, il faut entendre tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte ou surprise.
Le Code Pénal punit également l’attentat à la pudeur sur les mineurs de moins de quinze ans consommé ou tenté avec violence ; la peine prévue est de cinq à dix ans de prison et de 12 000 à 120 000 francs d’amende (article 331, alinéa 2 du Code Pénal).
L’attentat à la pudeur, commis ou tenté avec violence ou surprise, sur un mineur de quinze ans et plus est puni de trois à cinq ans de prison et 6 000 à 60 000 francs d’amende, sauf si c’est un ascendant (inceste) ou si c’est une personne ayant autorité sur elle, la peine prévue est alors de cinq à dix ans de prison et 12 000 à 120 000 francs d’amende (article 333, alinéas 1 et 2 du Code Pénal).
La contraception :
Le mineur, n’a pas besoin d’autorisation pour se procurer des contraceptifs : « Les centres de planification ou d’éducation familiale agréés sont autorisés à délivrer à titre gratuit des médicaments, produits ou objets contraceptifs sur prescription médicale aux mineurs désirant garder le secret… » (loi du 4 septembre 1974).
Les centres de planification ou d’éducation familiale agréés peuvent délivrer des médicaments ou produits contraceptifs aux mineurs désirant garder le secret en étant dispensés de la tenue du livre, registre d’ordonnances coté et paraphé par le maire ou le commissaire de police, sans blanc, rature ni surcharge (Code de la Santé Publique, article R 51 77).
L’interruption volontaire de grossesse :
Si la femme est mineure et célibataire, le consentement de l’une des personnes qui exerce l’autorité parentale, ou le cas échéant du représentant légal, est requis pour l’interruption volontaire de grossesse : « Ce consentement devra être accompagné de celui de la mineure célibataire enceinte, ce dernier étant donné en dehors de la présence de ses parents ou du représentant légal » (article L 162-7 du Code de la Santé Publique).
Cette I.V.G. ne peut se pratiquer qu’avant l’expiration de la dixième semaine de grossesse dans un établissement d’hospitalisation public ou privé (article L 176 du Code de la Santé Publique).
Elle n’est possible que pour les femmes françaises ou de nationalité étrangère résidant en France depuis au moins trois mois (on peut apporter la preuve par tous les moyens) (Tribunal de Grande Instance de Bobigny, 15 décembre 1976).
Dans le cas de refus de la personne qui exerce l’autorité parentale, la mineure peut saisir elle-même le Juge des Enfants. Certains tribunaux ont pu constater que la mineure était dans un état moral et matériel extrêmement préoccupant et, en conséquence, ils ont autorisé les autorités médicales à procéder à l’I.V.G. (Tribunal de Grande Instance d’Évry, 8 novembre 1982).
Le remboursement est prévu dans le cadre de l’assurance maladie.
L’enfant naturel :
Un mineur peut reconnaître un enfant naturel (Cour de Cassation Civile, 28 mars 1884).
Tout enfant naturel dont la filiation paternelle n’est pas légalement établie peut réclamer des subsides alimentaires à celui ou à ceux qui ont eu des relations avec sa mère pendant la période légale de conception (article 342 du Code Civil). L’action n’appartient qu’à l’enfant, et pendant la minorité de l’enfant la mère, même mineure, a seule autorité pour l’exercer.
Si la mère n’a pas reconnu l’enfant, si elle est décédée ou si elle se trouve dans l’impossibilité de manifester sa volonté, l’action sera intentée par le tuteur avec l’autorisation du conseil de famille. Les mêmes règles sont applicables en cas de recherche de paternité.
Le proxénétisme :
La prostitution n’est pas en elle-même punissable, mais (article 334 du Code Pénal) par contre quiconque :
1. – aide, assiste ou protège la prostitution d’autrui ou le racolage de manière quelconque ;
2. – partage les produits de la prostitution d’autrui ou reçoit des subsides d’une personne se livrant habituellement à la prostitution ;
3. – qui sciemment vit avec une personne se livrant habituellement à la prostitution… qui embauche, entretient même avec son consentement une personne en vue de la prostitution, etc. est puni des peines aggravées suivantes :
… lorsque le délit a été commis à l’égard d’un mineur : deux ans à dix ans de prison et de 10 000 à 1 million de francs d’amende.
Incitation de mineurs à la débauche :
Quiconque aura attenté aux mœurs en excitant ou favorisant, ou facilitant habituellement la débauche ou la corruption de la jeunesse de l’un ou de l’autre sexe au-dessous de l’âge de la majorité, ou même occasionnellement des mineurs de seize ans, sera puni d’un emprisonnement de deux à dix ans de prison et d’une amende de 100 000 à 1 million de francs (article 334-2 du Code Pénal).
Cette incitation de mineur à la débauche doit reposer sur un acte qui peut consister dans la location d’une chambre à des jeunes gens pour leur permettre d’y amener des mineurs (Cour d’Appel de Douai, 15 mai 1930).
Ce peut être aussi dans le fait d’accomplir des actes sexuels ou des scènes de débauche en présence de mineurs (Cour de Cassation, Chambre Criminelle, 15 juin 1930).
De simples conseils ou des propos obscènes ou l’invitation faite à des jeunes filles de poser nues ne sont pas pris en considération comme étant une incitation de mineur à la débauche (Cour d’Appel de Dijon, 15 janvier 1954 ; Cour de Cassation Criminelle, 11 décembre 1952).
Si l’enfant a plus de seize ans, l’infraction ne sera constituée que s’il y a habitude, c’est-à-dire s’il y a au moins deux actes répréhensibles.
À noter que l’erreur sur l’âge, due au développement physique de l’enfant, ne paraît pas devoir être prise en considération (Cour de Cassation Criminelle, 4 janvier 1902).
III. – AUTRES DISPOSITIONS DE LA LÉGISLATION CONCERNANT LES MINEURS
L’enfant n’a pas de domicile propre et autonome. Il peut être retenu au domicile par ses parents ou tuteur. L’enfant doit obtenir l’autorisation de ses parents pour quitter le domicile et aller ailleurs même provisoirement (voyages, colonie de vacances, etc.) (Code Civil, article 108).
L’enfant n’a pas le droit de choisir librement ses relations à l’extérieur de sa famille. Celui qui a la garde de l’enfant peut lui interdire de voir certaines personnes. Cependant, deux limitations existent :
1. – Les père et mère ne peuvent, sauf motif grave, faire obstacle aux relations personnelles de l’enfant avec ses grands-parents.
2. – L’autorité judiciaire, saisie par les intéressés, peut accorder dans des circonstances exceptionnelles un droit de visite à d’autres personnes, parentes ou non (Code Civil, article 371). Il peut s’agir de parrain ou marraine, oncles ou tantes, de personnes ayant recueilli l’enfant antérieurement, ou du conjoint d’un ascendant.
À noter que l’article 356 du Code Pénal indique que « celui qui, sans fraude ni violence, aura enlevé ou détourné, ou tenté d’enlever ou de détourner un mineur de dix-huit ans, sera puni d’un emprisonnement de deux à cinq ans et d’une amende de 500 à 8 000 francs ». Il suffit, pour que soit constaté l’enlèvement au sens de l’article 356, que le mineur ait été sciemment et volontairement entraîné et déplacé par un tiers pendant un certain temps, quand bien même il y aurait consenti et aurait déjà de son plein gré abandonné le domicile ou la résidence qui étaient normalement les siens (Cour de Cassation Criminelle, 24 juillet 1957).
Chacun a droit au respect de sa vie privée (Code Civil, article 9). Cependant, l’enfant ne peut seul contrôler sa vie privée ou la faire respecter, notamment l’usage et la publication de son image (Cour de Cassation Civile, 18 mai 1972).
Pour une photo d’un mineur, l’autorisation du père ou de la mère ou du représentant légal doit être expresse et spéciale, c’est-à-dire concerner non seulement la prise de vue mais aussi la publication (Tribunal de Grande Instance de Paris, 4 juin 1977).
juriste.
Pierre Lenoël est l’auteur de deux ouvrages traitant ces sujets plus amplement : La Capacité juridique de l’enfant mineur en droit français, édité par l’Institut de l’Enfance et de la Famille – Centre de Vaucresson, 1986 ; et Moins de 18 ans : vos droits, Éd. Lieu Commun, Paris, 1987.
Voir aussi
Source
- Joseph Doucé, La pédophilie en question, Paris, Lumière & Justice, 1988, p. 39-45.